Il y a quelques mois déjà, je cherchais désespérément une activité capable de raviver en moi le frisson de la découverte, de me rappeler pourquoi j’aime tant Montréal et sa vie culturelle. C’est alors qu’un ami m’a parlé d’une expérience inédite : un théâtre immersif dans un bar caché au cœur du quartier latin. Un dimanche après-midi, j’ai pris la direction du 4e Mur pour assister à la centième représentation de BRAQUAGE. Je vous raconte cette expérience un peu hors du commun.
Je me rends devant la porte discrète du 4e Mur (2021 Rue Saint-Denis, Montréal). Immédiatement, je plonge dans l’ambiance feutrée et intime d’un Montréal des années 1920, en pleine prohibition. Pour l’occasion, j’ai choisi une robe noire sobre, histoire de me fondre dans le décor. On se sent transporté dans une autre époque, surtout grâce aux quelques spectateurs qui ont joué le jeu en enfilant des tenues d’époque : vestons, chapeaux, robes en dentelle et colliers de perles. L’ambiance ressemble à une scène tout droit sortie de la série Peaky Blinders.
Le maître des lieux, costumé et parfaitement dans son rôle, accueille chaque groupe à la porte, nous guide jusqu’à notre table, où un premier cocktail nous est servi. Il ne sortira jamais de son personnage, et ce jusqu’à la fin de l’expérience.
Dans ce concept original, nous, les spectateurs, formons un jury de l’au-delà. Notre mission est de décider du sort de quatre âmes tourmentées. Sont-elles vouées à l’errance au purgatoire ou méritent-elles la rédemption ?
Avant de rendre notre jugement final, il nous faut mieux cerner les protagonistes. Chaque scène jouée dévoile un moment clé de leur existence, peu avant leur mort. Et ici, les acteurs ne se limitent pas à une scène fixe : ils déambulent tout autour de nous, entre deux salles, en ignorant volontairement notre présence. Nous les observons de près, tels des spectres. S’ils se mettent à se menacer à quelques centimètres de votre chaise, on vit l’intensité de la scène comme si on y était réellement. À tel point qu’on regretterait presque de s’être assis sur cette banquette de cuir.
Entre les scènes, nous recevons des documents pour comprendre l’histoire de chaque personnage. Ce qui rend l’expérience particulièrement fascinante, c’est que le public est invité à échanger et à se déplacer librement entre les différentes pièces. Chacun vit donc une expérience différente en fonction de sa place et les conversations partagées.
Le théâtre immersif, par définition, brise les barrières entre la scène et le public en intégrant véritablement le spectateur à l’action. Quel endroit plus approprié qu’un bar nommé Le 4e Mur pour donner vie à cette expérience théâtrale inédite ?
Vous aimez les arts de la scène et le côté immersif des jeux d’évasion, mais vous cherchez une expérience nouvelle dans un décor chic ? Difficile de trouver une sortie plus originale que BRAQUAGE pour un dimanche après-midi.
Et si l’idée de venir seul vous préoccupe, sachez que cela n’est absolument pas un problème, bien au contraire. Le concept inclusif de cette performance veille à ce que tous les spectateurs, même ceux venus en solo, soient intégrés à un groupe. Qui sait, vous pourriez même nouer des amitiés… voire plus ! On m’a même soufflé à l’oreille que certains couples s’étaient formés grâce à cette expérience.
Le 4e Mur accueille BRAQUAGE chaque fin de semaine depuis deux ans. Cette expérience complète met en scène cinq acteurs talentueux et vous plonge dans un univers captivant pendant trois heures durant. Le prix, d’environ 80$, inclut notamment deux excellents cocktails, dignes de la réputation du bar.
En remontant de ce sous-sol intimiste après trois heures d’immersion, on n’a qu’une seule hâte : réserver un billet pour découvrir une nouvelle histoire, et revivre cette expérience hors du commun. Toutefois, à l’heure actuelle, seule la compagnie EZKAPAZ offre de telles performances à Montréal. Il faudra vous rendre à New York ou à Paris pour en voir d’autres.
La pièce BRAQUAGE a été scénarisée en harmonie avec l’espace qui l’accueille. L’histoire s’inspire librement d’un braquage célèbre qui a eu lieu il y a exactement un siècle à Montréal. Les quatre personnages sont des bandits montréalais, chacun ayant des implications variées dans le casse. Le scénariste Guilhem Buccola, également associé gérant de la compagnie EZKAPAZ, a veillé à s’éloigner suffisamment de l’histoire originale pour éviter de glorifier le banditisme.