Le 12 avril 2018, des individus cagoulés ont fait irruption au restaurant La Petite Marche où se réunissaient des adhérents du comité local La République En Marche pour un 5@7 informel. Après avoir aspergé les personnes présentes de poivre, ils auraient brisé des verres et lancé une chaise sur un participant. Ce dernier, Michel F. (nom modifié), a accepté de se confier à Maudits Français, 7 mois après les faits.
“Il n’y a pas mort d’homme mais ça a été une étape difficile de ma vie. Les trois premières semaines, j’étais dans le noir chez moi, je n’avais pas le droit de lire ni d’écouter de la musique ni de regarder la télé à cause de la commotion cérébrale”, raconte la victime, contactée par téléphone, qui a repris du poil de la bête entre temps et son métier de réalisateur, petit à petit.
“Tout a été filmé (…). J’ai toutes les vidéos de ce qui s’est passé”, nous a confié le témoin, encore troublé par l’agression. “Ils étaient 17 exactement, c’est énorme, on les voit bien sur les images. (…) C’était hyper violent, on était tous incrédules”, raconte celui qui a reçu une chaise en plein thorax avant de tomber violemment sur le sol, tête la première. “J’ai eu le souffle coupé, je suis resté à terre”, se souvient Michel qui a fini par aller à l’hôpital.
Résultats des courses : un traumatisme crânien, une côte cassée, des acouphènes et l’incapacité à regarder des écrans durant plusieurs mois. “J’ai eu une interruption de travail jusqu’à ce que je guérisse : je me faisais évaluer chaque semaine en allant voir des spécialistes au CEPSUM, au CHUM et à l’hôpital Notre-Dame. Je suis toujours suivi. Côté travail, j’ai dû refuser une série télé parce que je ne me sentais pas capable”, raconte le professionnel de l’audiovisuel, lourdement handicapé, qui a repris doucement son travail. “Cet été, j’ai travaillé pendant un mois et demi sur un projet pour Netflix. Mais le médecin m’a évalué à 60% de mes capacités, seulement.”
Une enquête “bâclée” ?
Suite à l’agression, une plainte a été déposée et une enquête a été lancée afin d’élucider les circonstances de ces actes. Les enquêteurs du Service de police de la Ville de Montréal (SPVM) ont tenté d’identifier et de localiser “une dizaine de suspects” impliqués dans l’agression, en vain. “Il y a un barbu qu’on reconnaît vraiment bien sur les vidéos, ça me paraît impossible qu’on ne le retrouve pas… Il y a aussi deux ou trois personnes qui étaient reconnaissables puisqu’elles avaient retiré leurs masques. Même sur internet, ils ont revendiqué l’agression !”, raconte celui qui a été prévenu par un détective de la SPVM que l’enquête avait été classée sans suite.
Raison invoquée ? Les personnes suspectées ne sont pas les bonnes. “S’il y avait eu un attentat à la Petite Marche, je suis certain que les agresseurs auraient été mis sous les verrous trois heures après”, lance le témoin selon qui l’enquête a été “bâclée”. “Je me suis même demandé si je n’allais pas déposer une plainte officielle en France pour réouvrir l’enquête. Mon but ? Qu’on les retrouve pour qu’ils prennent conscience de ce qu’ils ont fait (…), c’est une question de principe. Je vais avoir des séquelles à vie, moi.”
De son côté, Line Lemay, lieutenante-détective au Module incidents et crime haineux du SPVM, nous a confirmé qu’aucun suspect n’avait été arrêté. “Toutes les démarches ont été faites pour identifier d’éventuels suspects mais cela n’a rien donné. Nous avons eu des retours non valides voire pas de retours du tout”, a expliqué l’agente par téléphone avant de préciser que l’enquête peut néanmoins être réouverte à tout moment.
“On peut rouvrir le dossier s’il y a des nouvelles infos, absolument ! Si certains témoins reconnaissent des gens, il faut qu’ils viennent nous le dire. Cela nous permettrait de solutionner le problème”, a indiqué Line Lemay avant de rappeler que toutes les victimes d’agression peuvent faire appel aux centres d’aide aux victimes d’actes criminels (CAVAC) mais également contacter l’IVAC pour toute demande d’indemnisation.
Les enquêteurs invitent “quiconque possédant de l’information qui pourrait permettre d’identifier et de localiser les suspects recherchés” de communiquer avec Info-Crime Montréal au 514 393-1133 ou en ligne. L’information sera traitée de façon anonyme et confidentielle.