L’humoriste Doully débarque au Théâtre Beanfield de Montréal ce soir avec son spectacle Hier, j’arrête : un stand-up percutant où les galères deviennent des punchlines, et où la liberté se conjugue au présent. Rencontre avec une artiste qu’on ne case pas.
Doully présentera Hier, j’arrête le 6 juin à Montréal (Théâtre Beanfield) et le 7 juin à Québec (ComediHa! Club). Billets disponibles sur lepointdevente.com et comediha.com.
Avant la scène, les planches de la vie
On la connaît pour son franc-parler sans filtre et sa tchatche cash. Mais avant de faire rire les salles pleines, Doully a multiplié les vies : « J’ai fait beaucoup de théâtre plus jeune. À 14 ans, je jouais déjà des pièces. »
Puis, la liste s’allonge : barmaid, vendeuse, madame pipi, prof de français en Espagne, créatrice de fringues… À 21 ans, elle avait déjà quitté le foyer depuis sept ans et enchaîné quatre métiers. Une boulimie d’expériences vécues à fond. « J’ai toujours eu besoin de mouvement. »
Quitter le nid pour se protéger
À 14 ans, elle quitte le foyer familial. Une décision mûrement réfléchie : « J’avais pas de chambre. Et je les aime tellement, mes parents, que je voulais pas avoir la crise d’ado où tu les engueules. Je me suis dit qu’il fallait partir. » Une décision que ses proches ont eu du mal à comprendre, mais qu’elle revendique aujourd’hui sans détour : « Est-ce que je serais cette femme aujourd’hui si vous m’aviez dit de ne pas partir ? »
Doully, c’est cette contradiction assumée : partir pour être seule… et ouvrir la porte aux autres. « À 15 ans et demi, j’ai accueilli tous les SDF de mon quartier chez moi. C’est drôle, je suis partie pour être seule et j’ai récupéré tout ce monde-là. » Mais son indépendance, elle y tient : « J’ai besoin d’être libre de mes mouvements tout le temps. Tu ne me verras jamais prévoir des vacances. En général, j’ai pas de billet de retour. »
L’humour comme révélateur
Ce goût pour l’imprévu, Doully l’a aussi sur scène. Surtout quand il s’agit de raconter son passé, sans filtre ni pathos. Les galères, la rue, les addictions… Doully n’en a jamais fait un tabou, mais elle refuse d’en faire une thérapie publique. « Si c’était une thérapie, ça deviendrait glauque. Moi ce que je veux, c’est toucher, sans juger », et ça c’est bien dit Doully.
Changer le regard
Ce qu’elle veut, c’est surtout casser les clichés : « Il y a des journalistes qui disent que je désacralise l’héroïne. Mais c’est pas ça. C’est juste que les gens croient que les toxicos, ce sont des connards qui n’ont pas de perspectives. C’est faux. J’ai vu des PDG tomber là-dedans. »
Le message est clair : « Toutes les addictions sont néfastes. Mais ce ne sont pas forcément des gens mauvais. » Et surtout, la sortie est possible : « Dans beaucoup de centres, on te dit : “T’es un toxico, tu restes un toxico. Mais c’est pas vrai. Moi, je vis sans avoir envie d’en reprendre. Ce n’est même pas un combat intérieur », ajoute-t-elle.
Tomber bas, parler vrai
« Je viens de loin », poursuit-elle. Mais pas pour faire de l’esbroufe. « Loin, c’est ce que vivent certaines personnes qui sont dans la rue à Montréal en ce moment, par exemple. Le fond du fond, c’est une dimension parallèle. J’y suis allée, et j’en suis sortie. »
C’est peut-être ça, la force tranquille de Doully : parler des choses dures avec une simplicité désarmante, comme si elle nous murmurait : tu peux t’en sortir, toi aussi.
Montréal et l’ailleurs
Depuis son arrivée à Montréal, elle y prend goût : « J’adore les Québécois. Franchement, vous êtes trop sympa. L’ouverture d’esprit ici, ça fait du bien. »
Elle savoure l’ambiance, le public, la douceur des échanges : « Y’a un truc apaisé ici, on se sent moins jugé, et ça fait du bien. »
Elle repartira pour la France dans quelques jours, mais certainement avec un petit morceau du Québec en poche. Et peut-être l’envie, un jour, de revenir un peu plus longtemps.