‘‘J’aime créer, sur scène ou pour les autres !’’, déclare Anthony Venisse, concepteur et metteur en scène du spectacle ‘‘Candide’’ dans le cadre de Montréal Complètement Cirque. Pour cet ancien acrobate, l’aventure cirque a débuté dès le plus jeune âge. ‘‘J’ai découvert le cirque à 8 ans, avec une petite compagnie qui n’existe plus aujourd’hui, le Cirque du Docteur Paradis.’’ Après s’être formé à l’école de danse Rudra-Béjart Lausanne et au Circus Space de Londres, Anthony Venisse poursuit sa formation à L’École nationale de cirque de Montréal où il se spécialise en trapèze ballant et en jeu clownesque.
En 2010, Anthony Venisse conçoit et développe le concept des Minutes Complètement Cirque. ‘‘Le but était de créer un volet extérieur et gratuit du festival’’, explique-t-il. ‘‘J’ai de la chance de pouvoir faire de ce qui me passionne mon métier’’, s’exclame-t-il entre deux conseils aux artistes pendant la dernière répétition générale. Anthony Venisse a déjà signé de nombreuses mises en scènes, notamment pour l’École nationale de cirque de Montréal, le Cirque du Soleil et les cabarets GOP-Variete en Allemagne. Cette année encore, il occupe la place des Jardins Gamelin à Montréal pour un nouveau spectacle inspiré du conte philosophique de Voltaire.
‘‘On peut venir voir le spectacle sans avoir lu Candide’’, s’exclame en riant Anthony Venisse. Mais le metteur en scène voulait partir du conte et des impressions qu’il lui avait laissées comme base de la représentation. ‘‘Ce qui m’a inspiré, ce sont notamment les rencontres que fait le personnage. Avec l’amour, la haine, la violence, l’armée. Mais ce que j’ai surtout retenu, c’est sa capacité à résister aux épreuves de la vie. Tout le monde doit apprendre comment se comporter face à ces épreuves.’’
Dans l’oeuvre de Voltaire, Candide, chassé du château de Thunder-ten-tronckh pour avoir déposé un baiser sur les lèvres de sa belle Cunégonde, parcourt le monde et en découvre les pires aspects. Engagé de force dans l’armée bulgare, arrêté par l’Inquisition, son ami et précepteur pendu, la femme qu’il aime séquestrée… Les malheurs de Candide paraissent sans fin. Mais le personnage garde en tête les préceptes de son maître : ne jamais renoncer à l’optimisme.
Pour interpréter tous ces sentiments, Anthony Venisse est allé chercher dans les numéros ‘‘de la puissance, mais aussi la force du groupe face à la difficulté.’’ Tissus acrobatiques, équilibres, numéros de sangle ou roue au sol : les numéros s’enchainent avec une rapidité étonnante et nous charme tous les uns plus que les autres. Majestueux ou anarchiques, les trente-deux artistes s’envolent et retombent en flèche, fourmillent, se balancent et se lancent. Dans le ciel ou sur la large piste ronde entourée par le public, ils oscillent entre droiture et instinct, entre rigueur et aventure, portés par une puissante trame sonore faite de ces contrastes. Qu’elle tourbillonne au sol ou en suspension, la troupe nous entraine dans une fresque aussi grandiose qu’émouvante dont on sort vivifiés.
Tout au long de l’apprentissage d’Anthony Venisse, la musique occupe une place importante. C’est pourquoi le spectacle est rythmé pas de nombreuses chorégraphies. ‘‘J’aime chorégraphier le corps et les mouvements acrobatiques’’, explique-t-il. Une façon selon lui de ‘‘donner encore plus de rythme au show.’’
Pour tout amateur de cirque, Montréal est une ville qui offre ‘‘de nombreuses opportunités’’, observe ce Français d’origine qui a adopté le Québec il y a près de 20 ans. Même s’il estime que ‘‘l’Europe a une culture cirque plus développée.’’ Ce sont dans les années 1970 que le cirque devient ‘‘un art à part entière’’ au Québec, continue-t-il. ‘‘Mais il y a une signature à Montréal que je ne retrouve nulle part en Europe. D’ailleurs, je suis venu ici pour étudier et je n’en suis jamais reparti !’’, rit Anthony Venisse.
Metteur en scène accompli mais également artiste, Anthony Venisse aime alterner des passages sur scène et des moments en coulisse. ‘‘J’ai fait beaucoup d’acrobaties. Maintenant, je me spécialise dans la magie et le jeu clownesque.’’ Dans son spectacle de 2014, ‘‘Le concierge’’, Anthony Venisse avait déjà captivé notre attention. Tantôt danseur, trapéziste ou pianiste inattendu, son personnage loufoque et touchant joue avec l’absurde. Qu’il soit aux prises avec un lapin déconcertant, emporté dans un funeste ballet sur pointes ou encore aux commandes d’un piano récalcitrant, son concierge exprime l’urgente quête d’imaginaire et de rêve enfouie en chacun de nous. Anthony Venisse fait également partie d’un duo clownesque avec sa sœur, Amélie, à retrouver en Europe ‘‘certainement à la rentrée prochaine.’’
Pendant le festival, la représentation de ‘‘Candide’’ a lieu tous les soirs aux Jardins Gamelin à partir de 19h15. À la suite des Minutes complètement cirque, les acrobates se retrouvent à l’ombre d’une immense arche acrobatique pour un spectacle inspirant. ‘‘Evoluer en plein air implique beaucoup plus de contraintes que jouer sous un chapiteau’’, déclare Anthony Venisse. Jouent notamment l’environnement sonores et la pollution lumineuse de la place. ‘‘Le confort n’est pas le même que dans une salle de spectacle’’, détaille-t-il encore. ‘‘Mais le principal problème reste la météo. A cause du temps, nous avons pris beaucoup de retard. Et nous sommes dépendants de la pluie et du beau temps…’’
Cependant, le choix a été vite fait. ‘‘Candide sera un spectacle de rue.’’ L’artiste et metteur en scène aime tout particulièrement la proximité qui se crée avec le public. Certains connaissent bien le cirque, d’autre n’ont peut-être jamais eu les moyens de se payer une place pour un spectacle sous chapiteau. ‘‘Avec un spectacle en extérieur, on rejoint tout le monde. La vibration chez le public est unique !’’, s’exclame-t-il. ‘‘J’aime partager mon univers avec le public dans la rue, pour l’offrir au plus grand nombre. J’aime surprendre les gens, c’est l’essence même du cirque.’’