En France, ouvrir une bouteille de vin, c’est tout un rituel : on sort le tire-bouchon, on savoure le « pop » du liège et, parfois même, on en repêche quelques morceaux dans son verre. Au Québec, c’est une autre histoire. Ici, la majorité des bouteilles s’ouvrent d’un simple tour de poignet. Moindre qualité ou simple évolution des habitudes ? C’est notre question bête du jour.
Qui n’a jamais sourcillé devant une bouteille au bouchon qui se dévisse en pensant : « Le vrai bon vin, c’est embouchonné » ? Pourtant, cette idée reçue vient surtout d’un profond attachement au patrimoine gastronomique français.
« C’est assez compliqué d’imaginer des bouteilles à dévisser sur des tables françaises. Pour une question d’élégance, ça plaît moins. Ça fait partie de cette culture d’exigence », explique d’abord Jordane Knab, chef sommelier du restaurant Le Boulevardier, à Montréal.
En effet, le rituel d’ouverture du vin s’est ancré dans l’histoire au fil des siècles. Alors forcément, changer les habitudes, c’est tout un défi. Pour certains, plus que pour d’autres !
« Je prends toujours l’exemple de mon tonton Alain en Bretagne, qui était dans l’armée, qui boit toujours du Bordeaux. Pour lui, un bouchon à vis ne devrait pas exister. », raconte le spécialiste en vin.
Mais les modes de consommation ont bien changé en 20-30 ans. « Avant, on achetait des vins par caisse, on gardait une bouteille pour la semaine et on laissait le reste s’endormir dans le cellier », raconte Jordane Knab.
Aujourd’hui, les consommateurs s’ouvrent à des vins du monde entier, achètent la bouteille de vin le jour où ils comptent la boire, et s’habituent aussi de plus en plus aux bouchons qui se dévissent. « À l’international, les habitudes changent vite. En France, c’est un peu plus long. Mais ça va évoluer ! », croit le sommelier.
Les Français adorent le bouchon de liège, mais est-il toujours indispensable ?
« Il ne faut pas jeter la pierre sur les bouchons à vis ou les bouchons en liège, je pense qu’on a besoin des deux. Cela dépend de quel vin on va prendre et comment on va le consommer », souligne Jordane Knab.
En clair, si vous ouvrez la bouteille le soir-même ou dans la semaine, le liège n’est pas nécessaire. Un bouchon qui se dévisse faire l’affaire. Mais pour un vin de garde, c’est une autre histoire. « Le liège va laisser un tout petit peu d’air pour que le vin puisse se développer. Comme c’est l’un des meilleurs isolants au monde, il va se gonfler petit à petit dans la bouteille », explique ce dernier.
En effet, un vin de garde évolue avec le temps : il gagne en complexité et devient meilleur après plusieurs années. Si c’est difficile pour l’oncle du sommelier, « tonton Alain », d’imaginer son vin préféré – un bon Bordeaux avec un gros millésime – fermé avec un bouchon qui se dévisse, c’est certainement parce qu’il n’est pas destiné à l’être. À chaque vin, son bouchon.
En revanche, concernant la praticité, difficile de battre les bouchons à vis. Pas besoin de tire-bouchon, on tourne et on sert. Simple et efficace.
Le choix du bouchon a aussi un impact écologique. « Le chêne-liège met 9 ans à refaire du liège, ce n’est pas rien. Si on utilise trop de liège, on ne laisse pas le temps au chêne de refaire de l’écorce », rappelle Jordane Knab.
Les bouchons à vis, eux, sont en métal et moins recyclables. « Je pense qu’il faut mixer les deux… pour ne pas abuser de l’un ou de l’autre. C’est un équilibre à avoir. »
Avec la hausse de la consommation de vin, il fallait une alternative pour préserver les forêts de chênes-lièges. D’où le succès grandissant des bouchons à vis.