Un hommage au genre et à ses chefs d’oeuvre mais aussi une critique des mythes et stéréotypes qui se sont imposés puis ont été déconstruits au cours de l’évolution du western dans l’histoire. C’est l’ambitieux objectif de la nouvelle exposition du Musée des Beaux-Arts de Montréal (MBAM), conçue en collaboration avec le Denvert Art Museum, qui commence le 14 octobre.
“C’est l’histoire d’une mythologie qui a émergé à un moment où la conquête de l’Ouest elle-même était terminée”, raconte Nathalie Bondil, directrice générale et conservatrice du Musée des Beaux-Arts, qui a été à l’origine du projet. “Ce qui me fascinait énormément car je suis une immigrante (…), explique la directrice française, c’était la pertinence de ces valeurs qui encore aujourd’hui structurent l’imaginaire américain”.
En faisant le lien entre le cinéma et les arts visuels (peinture, sculpture, photographie…), l’exposition multidisciplinaire décrypte comment les valeurs, mythes et stéréotypes du western se sont créés, construits et transformés aux États-Unis et au Canada depuis le milieu du 19ème siècle jusqu’à nos jours. “Le western a toujours été plus qu’une simple histoire de ‘cowboys et d’indiens'”, commente Mary-Dailey Desmarais, co-commissaire de l’exposition. “Fondamentalement, il est l’épopée d’une nation qui se construit, avec les succès, les échecs, les fantasmes et les hypocrisies que l’aventure comporte“.
Au fil des salles, on découvre comment cette mythologie s’est construite autour d’enjeux liés à la race, la virilité, la violence et le nationalisme. Les figures emblématiques du western comme le cowboy, “l’indien”, le pionnier ou le soldat de cavalerie notamment, cristallisent les stéréotypes de l’époque. Les personnages historiques comme Buffalo Bill, Geronimo, Billie The Kid ou Calamity Jane alimentent les légendes.
Mais depuis les grandes peintures de paysages de l’Ouest jusqu’aux films de John Ford, Sergio Leone, Quentin Tarantino, des frères Coen… le genre évolue vers une distanciation et une réinterprétation notamment autour de la contre-culture à la fin des années soixante et des questions raciales, de sexualité et de genre à partir des années quatre-vingt-dix. Les motards de Easy Rider ou les cowboys homosexuels de Brokeback Mountain renouvellent par exemple le western et font exploser les codes.
L’exposition montre également le regard des artistes autochtones sur cette partie tragique de leur histoire. “Une des préoccupations est ici d’examiner les stéréotypes des Premiers Peuples perpétués par le western, en démontrant le pouvoir de l’art pour façonner les mythes, mais aussi pour ébranler les plus solidement établis”, commente Mary-Dailey Desmarais. Des dessins anonymes cheyennes et oeuvres d’artistes autochtones contemporains offrent une perspective bien différente au fantasme de la conquête.
L’exposition plaira aux adultes avec ses nombreux extraits de films mythiques ou moins connus, oeuvres et pièces iconiques (comme la diligence de Buffalo Bill), mais aussi aux enfants. Un espace leur est d’ailleurs réservé : “Le Petit Western”, qui invite les familles à découvrir et déconstruire le mythe au travers d’activités de création, d’ateliers-rencontres et de séances de cinéma.