“Le Québec est-il vraiment la terre promise du féminisme qu’on décrit souvent?” C’est la question que se posait Emeline Amétis, journaliste française qui a vécu à Montréal. Elle a décidé, avec sa collègue Clémentine Gallot, d’en faire un sujet, “Québec, terre promise”, épisode du podcast “Quoi de meuf?”, produit par Nouvelles Écoutes.
« On voit souvent le Québec avec des étoiles dans les yeux, explique Emeline Amétis. Effectivement, il y a beaucoup de progrès intéressants au Québec, c’est un endroit très agréable à vivre quand on est une femme, mais ça dépend pour qui ». Le podcast débute en évoquant les colons français et britanniques ainsi que la prise de pouvoir sur les peuples autochtones, les lois discriminantes, les pensionnats et autres politiques d’assimilation. « La situation des personnes autochtones et des premières nations est encore très difficile de nos jours. Plus de 1200 femmes ont disparu et/ou ont été assassinées, et ce sont seulement les chiffres officiels », poursuit Emeline. Les deux journalistes soulignent aussi les événements tragiques récents avec la mort de la jeune autochtone Joyce Echaquan, tuée dans un hôpital par du personnel raciste.
Le mouvement masculiniste est aussi évoqué, notamment avec la tuerie de masse de polytechniques, qui a eu lieu en 1989. 14 étudiantes ont été froidement abattues un misogyne, considéré comme un martyr par les plus extrémistes du mouvement. « On retrouve des similarités en France avec des groupes de droit de père ou encore la putophobie médiatique qui existe ici aussi », exprime-t-elle. Enfin, certains enjeux sont similaires au Québec comme en France, notamment la pénalisation des clients des travailleurs et travailleuses du sexe. « De telles lois inspirées par « le modèle nordique » sont dénoncées par des travailleuses du sexe à travers le monde comme dangereuses, parce qu’elles estiment que ces lois les mettent plus en danger qu’elles ne les protègent. Une loi semblable à celle du Canada a été promulguée en France en 2016. »
« Je pense que le Québec peut inspirer la France sur de nombreuses choses »
De belles avancées sont aussi racontées dans l’épisode. On y parle notamment du Front de libération des femmes du Québec (FLF), de la Marche du pain et des roses, de la Marche mondiale des femmes ou encore, plus récemment de l’événement Idle No More en 2012. « Le mouvement féministe est plus perceptible qu’en France », pense Emeline.
Ce dynamisme se traduit aussi par la féminisation des mots et des métiers, mais aussi des manuels scolaires qui s’avèrent être plus inclusifs depuis déjà plusieurs années. Le récent mouvement Metoo qui a pris une ampleur marquée au Québec est aussi évoqué. Plus de 1100 agresseurs présumés, notamment des célébrités, ont été dénoncés avec le hashtag #agressionssexuellesnondenoncées. Un mouvement sans équivalence en France.
Emeline et Clémentine concluent leur épisode en soulignant l’importance de nuancer. Malgré les belles avancées qui peuvent inspirer d’autres pays, l’histoire et les personnes les plus démunies restent encore et toujours en marge de la société au Québec, et notamment les femmes. « On retrouve ça dans tous les pays occidentaux, conclut Emeline. Le « ça dépend qui nous sommes » est totalement valable en France aussi. On n’a pas la même vie si on est une femme pauvre, musulmane ou blanche et bourgeoise ».
Pour en savoir plus : un podcast à découvrir ici.