Célia Laguitton vit pour la scène. Et pour ses enfants. Cette comédienne à la tête de la troupe de théâtre montréalaise Minuit Moins Une se lance dans une aventure intime et artistique : en juin, elle présentera C’est toi qui as fait tomber l’arbre, sa première pièce en tant que dramaturge. Un texte écrit après la tempête de pluie verglaçante d’avril 2023, qu’elle interprétera aux côtés de ses deux fils au festival Fringe de Montréal.
Avant Montréal, il y a eu Paris. Célia Laguitton y a passé la première partie de sa vie. Mais en 2010, quand son premier fils avait six mois, elle et sa famille ont décidé de tout recommencer ailleurs. « On voulait élever nos enfants autrement, avec plus d’espace et de sécurité », confie-t-elle.
Elle a quitté la capitale française, mais pas ses rêves de théâtre. Forte de ses expériences en théâtre amateur et d’une formation d’un an au conservatoire, elle a poursuivi sa passion au Québec. Quinze ans plus tard, la comédienne dirige sa propre troupe, Minuit Moins Une, et s’apprête à faire entendre sa voix de dramaturge.
« Au départ, je suis interprète, mais en tant qu’artiste, on doit toujours développer de nouvelles compétences », souligne-t-elle. Outre l’écriture, elle a rejoint une ligue d’impro et cocréé en 2023 le collectif Y’a le feu au lac, qui organise des séances de lecture. C’est via ce projet qu’elle s’est mise à la dramaturgie.
S’imposer dans le milieu théâtral montréalais n’a pas été de tout repos. En 2019, elle expliquait déjà la difficulté de faire sa place. « C’est difficile d’être intégrée dans des productions, mais ça s’en vient. C’est sûr que je dois redoubler d’efforts pour me faire connaître, faire entendre ma voix d’artiste, ma façon de parler et mon accent. Mais ce défi me pousse à écrire, à monter ce spectacle, à faire de l’impro… à développer d’autres forces ».
L’histoire de C’est toi qui as fait tomber l’arbre trouve racine dans un chaos bien réel : la tempête de pluie verglaçante du 5 avril 2023, qui a plongé Montréal dans le noir et fait tomber près d’un millier d’arbres. « J’ai commencé à écrire cette pièce le mois suivant. Je pense que j’ai été influencée par ce qu’on venait de vivre, c’était particulièrement marquant », raconte Célia Laguitton.
Un enseignant en dramaturgie lui avait conseillé d’écrire à partir d’une angoisse. La sienne ? Tout préparer avant un départ en voyage. De cette peur, elle a tiré un monologue, puis a fait émerger deux fils, donnant naissance à une famille en crise, à la veille d’un grand départ.
Une famille se prépare à prendre l’avion pour les îles Baléares. Mais ce jour-là, une tempête éclate. Et elle ne fait pas que souffler dehors…
Au cœur de la pièce : une mère et ses deux fils plongés dans un chaos météorologique et émotionnel. Partiront-ils ce soir ? « Si on essaie de fuir la tempête sous les cocotiers, est-ce que les palmiers vont nous permettre de faire disparaître nos problèmes ? », questionne Célia Laguitton.
C’est toi qui as fait tomber l’arbre s’adresse autant aux adultes qu’aux plus jeunes, avec un double niveau de lecture. Derrière la comédie se glissent des thématiques universelles : l’adolescence, la jalousie, l’image de soi ou encore les tensions de fratrie.
Célia Laguitton a toujours voulu travailler en famille. « Le business familial, ça me parle à fond la caisse ! », lance-t-elle. Lors d’une lecture en groupe de son texte, elle a demandé à son plus jeune fils d’interpréter l’un des personnages, et l’idée qu’il l’incarne sur scène a émergé : « J’ai aimé sa façon de lire, ça m’a touchée ». Ses deux fils ont finalement embarqué dans le projet, suivis de plusieurs de ses proches.
Pour cette mère de famille, le théâtre est aussi une école de la vie. « Ils apprennent la rigueur du travail, à parler, à regarder dans les yeux, à porter la voix, à avoir une bonne posture. Le théâtre donne des forces immenses », affirme-t-elle.