Clothilde Lauriol est arrivée à Montréal il y a sept ans afin de poursuivre sa carrière d’infirmière. Aujourd’hui, son activité est toute autre. La quinquagénaire a co-fondé l’entreprise C&G relocation. Le but ? Aider les nouveaux arrivants à s’installer et à se projeter dans leur nouvelle vie. Un projet qui lui tient à coeur. Elle nous a raconté sa reconversion professionnelle.
Après avoir vécu jusqu’à ses 18 ans dans le nord de la France et en région parisienne, elle est partie en Martinique pour exercer sa profession d’infirmière. Peu de temps après, c’est à Montréal qu’elle a finalement posé ses valises. « Je me suis naturellement tournée vers mon métier d’origine et j’y ai trouvé un poste d’infirmière l’année où je suis arrivée », raconte la Française de Montréal dont la pénurie d’infirmières au Québec a joué en sa faveur. Une semaine avant son intégration dans le service hospitalier, elle a suivi un stage pour faire le pont entre les deux cultures médicales. « Car nous n’utilisons pas le même vocabulaire ni les mêmes médicaments qu’en France ».
Mais rapidement, Clothilde déchante et ne se sent pas à sa place. Plusieurs ombres se profilent au tableau, à commencer par le manque de communication et de transmission d’informations entre les équipes de l’hôpital. « La prise en charge du patient et les exigences étaient très différentes de ce que je connaissais. Je ne me sentais pas à la hauteur. » À cela s’ajoutent des situations qui l’horrifient et dont elle refuse d’être complice. « Dans un même ascenseur, il y avait : les visiteurs, les malades pour le bloc opératoire et le circuit pour le linge sale. C’était vraiment déplorable », se souvient encore la Française qui n’en dira pas plus.
Après un mois et demi d’exercice, la page est tournée, Clothilde quitte définitivement l’hôpital et modifie son plan de carrière. « J’ai réalisé que ce n’était plus possible (…). S’il y a un premier constat d’échec, c’est compliqué de revenir en arrière », avoue l’ex-Parisienne.
Chef d’entreprise autodidacte
Le hasard fait parfois bien les choses. Sa conseillère en relocalisation, qui l’avait aider à trouver son logement montréalais, la rappelle. « Lorsqu’elle a appris que je cherchais du travail, elle m’a proposé de venir dans son entreprise pour effectuer quelques tâches administratives », raconte Clothilde qui a fini par travailler elle-aussi dans une autre entreprise de relocalisation. C’est d’ailleurs là-bas elle a rencontré Gwen Lelu, sa future associée.
La chef d’entreprise en devenir se forme sur le terrain, à l’ancienne. « On me confiait des tâches diverses et variées : recherches de garderies, prises de rendez-vous avec des banques ou des écoles, etc. Il fallait que le métier rentre ! Et puis, peu à peu, j’ai décroché mes premiers mandats avec des clients directs », raconte la Française.
Au bout de 6 mois, Clothilde devient officiellement consultante en relocalisation. Autrement dit, une professionnelle qui, par son expertise locale, simplifie le processus d’immigration des nouveaux arrivants. “L’agent en relocalisation guide et accompagne ses clients, tout au long du processus d’expatriation. Il s’assure de faciliter les démarches d’installation et d’intégration de nouveaux arrivants”, raconte Clothilde, fière d’exercer ce nouveau métier. À noter qu’au Québec, aucune formation n’est obligatoire pour obtenir un poste de conseiller en mobilisation internationale de ce type.
En janvier 2017, l’ex-infirmière crée sa propre entreprise et fonde C&G relocalisation avec Gwen Lelu, une ancienne professeure d’anglais, elle-aussi reconvertie professionnellement.
Avec le recul, Clothilde avoue que le chemin qu’elle a parcouru n’est pas forcément à la portée de tous. « Il faut savoir saisir l’opportunité et être ouvert. Ne pas aller trop vite et changer de mentalité, surtout. Souvent les gens se disent : “je veux changer de vie et de métier”. Est-ce que c’est vraiment un projet de vie ? ». Telle est la question.
À ses compatriotes qui s’apprêtent à faire le grand saut, elle conseille de perdre certaines habitudes très (trop ?) françaises. « Souvent, les Français vont penser qu’ils peuvent se débrouiller seuls. Attention, l’immigration c’est un vrai défi ! Entourez-vous de professionnels pour parvenir à vos fins », prévient encore celle qui a su étoffer son réseau en pleine reconversion pro. Au final, elle est sûre d’une chose : « Il ne faut pas rester coincé comme un maudit Français ! ».