Marianne Lefebvre, nutritionniste et diététiste, spécialisée en nutrition internationale, est la fondatrice d’Intégration Nutrition. Ce 9 octobre, à Montréal Cowork, elle donne une conférence intitulée “Saveurs d’ailleurs dans des boîtes à lunch d’ici“. On a profité de son événement pour lui poser toutes nos questions sur la fameuse boîte à lunch.
“La boîte à lunch et les collations sont des notions très nord-américaines. Dans beaucoup de pays dans le monde, on ne fait pas de boîte à lunch : soit on mange à l’extérieur, soit on rentre à la maison”, raconte la spécialiste, habituée à devoir expliquer certains termes spécifiques aux immigrants et nouveaux arrivants, dont les Français font partie. Oubliez donc les dîners/déjeuners tous les midis à l’extérieur du bureau (et les tickets restos). “Ici, un dîner/déjeuner complet à moins de 20$ ou 25$, ça n’existe pas.”
Premier pas vers une boîte à lunch digne de ce nom : se doter d’un contenant agréable. “Si, à chaque fois que tu ouvres ta boîte à lunch, ton sandwich est à moitié défait et dégarni, cela ne donne pas envie”, raconte Marianne Lefebvre, qui conseille d’acheter des contenants pratiques ainsi qu’un sac à lunch lavable, des ustensiles (couverts) réutilisables et des blocs réfrigérants. “N’hésitez pas à acheter des choses ou des aliments uniquement pour vos lunchs. Pour une cinquantaine de dollars, on peut trouver son bonheur. C’est un investissement à faire !”, conseille l’experte selon qui le secret d’un lunch idéal réside dans la réduction des aliments transformés et dans la variété des aliments utilisés.
En hiver ? “Il faut manger plus varié mais pas plus”
“J’essaie d’inculquer aux gens la curiosité culinaire d’intégrer des aliments d’ailleurs : c’est une bonne façon de limiter les aliments ultra-transformés”, explique la nutritionniste avant de faire tomber un mythe. “En hiver, ce n’est pas vrai qu’il faut manger plus pour se garder au chaud ! Il faut manger plus varié mais pas plus. C’est la variété des aliments consommés qui prime sur le reste”, précise Marianne Lefebvre avant d’ajouter qu’il arrive qu’on prenne généralement un peu de poids en hiver. Surtout les plus frileux — parfois engloutis par le canapé.
Pour les casaniers qui sortent moins en hiver, il peut être bon de réduire les portions alimentaires journalières. “Mais j’encourage fortement les gens à être aussi actifs en hiver qu’en été. C’est aussi ce qui rend la saison agréable grâce aux sports d’hiver. N’ayez pas peur de demander à vos collègues ou amis québécois qu’ils vous emmènent faire de la raquette, du ski alpin, de la pêche sur glace, etc. Il y a plein d’activités gratuites ou peu coûteuse, profitez-en !”. À condition d’être bien habillés, évidemment.
À noter qu’il est surtout important de manger des aliments présents dans chacun des quatre groupes (classés en fonction de leurs valeurs nutritives) : légumes et fruits, produits céréaliers, produits laitiers et substituts, viandes et substituts. Astuce : dotez-vous d’une boîte à lunch où vous pouvez compartimenter vos repas.
Fruits, légumes et eau à gogo
“Au Québec, en hiver, il y a évidemment moins de fruits et légumes locaux disponibles mais il faut quand même en consommer beaucoup. Petite astuce : tournez-vous vers les produits surgelés plutôt que les produits frais”, lance la nutritionniste qui précise aussi que la surgélation est maintenant monnaie courante au Québec. Pour celles et ceux qui n’y connaissent pas grand chose, sachez que la surgélation consiste à congeler très rapidement à très basse température un aliment pour conserver ses valeurs nutritives (à la différence de la congélation où il y a une plus grande perte de vitamines et minéraux).
En hiver, comme en été, veillez aussi à bien vous hydrater. “Plus nos muqueuses nasales ou buccales sont sèches, plus on a de risques de tomber malade. Achetez-vous une bouteille d’eau réutilisable et assurez-vous d’en boire au moins deux fois son contenu par jour. Souvent on confond la faim avec la soif. Il faut s’hydrater, c’est important !”, martèle la nutritionniste qui nous invite aussi à consommer des yaourts (probiotiques) pour rester en bonne santé.
Envie de poutine ?
Quand l’hiver approche, vous avez peut-être souvent envie d’une poutine, d’un pâté chinois, d’un bon braisé au four, d’une sauce à la crème, d’une raclette, ou de bouillis (pot-au-feu)… “Souvent, quand on a une envie spécifique d’un aliment, c’est que notre corps manque de quelque chose ! En hiver, comme on sort moins, on va avoir plus d’envies d’aliments réconfortants, c’est normal”, nuance la nutritionniste qui a fait de la santé des immigrants son cheval de bataille.
C’est une étude montréalaise sortie en 2013, démontrant que l’état de santé des immigrants périclitait rapidement après quelques années au Canada, qui l’a incitée à en faire plus pour cette tranche de population. “Chez les immigrants, la santé est le seul indicateur qui ne s’améliore pas avec le temps : elle ne fait que se détériorer”, explique Marianne qui a donc lancé son site dans l’optique d’outiller les immigrants mais aussi les intervenants à favoriser l’éducation au “bien manger” et diminuer les problèmes de santé.
“Une personne qui manque d’énergie, qui n’est pas en forme, qui a pris du poids, qui a des problèmes intestinaux, etc : ce n’est pas vrai qu’elle va être à son meilleur pour aller chercher un emploi. La santé est à la base de l’intégration dans une société”, confie Marianne, spectatrice privilégiée des différences culturelles entre les pays.
“Au Maroc, le temps moyen pour préparer un souper est estimé à 180 minutes, en France à 53 minutes et au Canada, 38 minutes. Quand t’es habitué·e à mettre une heure et demie à te préparer ton repas et qu’avec ton nouveau mode de vie, t’as 38 minutes pour faire à souper, c’est difficile !”, raconte la spécialiste, qui ne cesse de répandre ses astuces pour permettre aux immigrants de s’intégrer en respectant leurs valeurs.
Pour votre boîte à lunch, gardez ceci en tête : tout est question d’équilibre. “Apportez certains changements à vos habitudes françaises, et le tour est joué !”. Bon appétit…