Une grande exposition consacrée à Leonard Cohen sera inaugurée le jeudi 9 novembre au Musée d’Art Contemporain de Montréal (MAC). En attendant, allons sur les traces de l’auteur-compositeur-interprète et poète à Montréal, sa ville natale qui lui a inspiré la chanson “Suzanne” et qui lui rendra hommage tout au long du mois de novembre et au-delà.
Sur le Plateau, ses voisins se souviennent
C’était son quartier d’adoption, celui qu’il avait choisi au début des années 1970 pour acheter sa maison, située au 28 rue Vallières, au coeur du quartier portugais sur le Plateau. Le soir de sa mort, le 7 novembre 2016, et pendant plusieurs jours, nombreux étaient les montréalais venus lui rendre hommage devant sa porte, illuminée par de nombreuses bougies. Bien qu’installé à Los Angeles, le chanteur revenait de temps en temps dans cette maison et avait ses habitudes dans le quartier.
Ses voisins se souviennent d’un homme simple qui n’avait pas une attitude de star. “Il nous achetait des pantoufles, raconte Steve Schreter, propriétaire du magasin Schreter boulevard Saint-Laurent. Il les trouvait très confortables et les portait non seulement chez lui mais aussi dehors, dans la rue“. Simon Rosson, propriétaire du café voisin Bagel Etc, s’en souvient aussi. “Lorsqu’il était à Montréal il venait chaque matin. Il prenait trois ou quatre cafés allongés avec moi lorsque j’étais en train d’ouvrir. On ne parlait jamais vraiment de sa musique mais plutôt de l’actualité, des émissions de télévision ou des choses qu’on aimait (…). C’était juste un gars local, du quartier.”
Le propriétaire du café appréciait notamment son extrême délicatesse : “Lorsqu’il était dans le café, les gens qui le reconnaissaient venaient lui dire “Monsieur Cohen on vous aime, on adore vos chansons” et retournaient s’asseoir pour ne pas le déranger. Ce qui m’épatait c’est que lorsqu’il quittait le café, où que soient installées les personnes qui l’avaient salué, il retournait les voir, juste pour leur dire au-revoir et merci“.
Aujourd’hui, on peut apercevoir aux abords de la maison du 28 rue Vallières le fils du chanteur, Adam Cohen, qui y séjourne de temps en temps. Non loin de là en juin dernier, les Montréalais découvraient dans le cadre du Mural Festival la première grande murale représentant Leonard Cohen, sur l’édifice Cooper.
À Westmount, quartier d’enfance du chanteur
Né au 599 Belmont Avenue, Leonard Cohen a grandi dans le quartier anglophone de Montréal. À l’âge adulte, il est revenu habiter quelque temps cette maison avec la fameuse Marianne (sa compagne de l’époque Marianne Ihlen) à leur retour de Grèce, avant que le chanteur achète la maison de la rue Vallières. Adolescent, il a fréquenté la Herzliah High School où a enseigné le poète Irving Layton qui l’a aidé à publier son premier recueil de poèmes en 1956 “Let us compare mythologies”, et a également étudié à la Westmount High.
À sa mort , il a choisi de reposer auprès de sa famille, au cimetière Shaar Hashomayim. C’est d’ailleurs dans la synagogue éponyme qu’il a été exposé enfant à la musique et aux chants rituels, qui lui inspireront sans doute plus tard sa fameuse chanson “Hallelujah”. Son dernier album, “You want it darker” est également très empreint de l’éducation religieuse qu’il a reçue enfant à Westmount.
Dans le quartier du Vieux-port, qui a inspiré la chanson “Suzanne”
Dans sa biographie I’m your man: The life of Leonard Cohen, Sylvie Simmons cite l’artiste racontant à la BBC comment il a écrit la fameuse chanson. “Je savais que c’était une chanson sur Montréal, confiait-il, elle semblait émaner de ce paysage que j’aimais beaucoup à Montréal : le port, les quais et l’église de pêcheurs Notre-Dame-de-Bon-Secours qui surplombait le fleuve… Dans cette image s’est invitée la femme d’un de mes amis. Ils formaient un couple sensationnel à Montréal à cette époque, physiquement éblouissant (…). Je l’ai croisée un soir et elle m’a invité chez elle, près du fleuve (…) Et les bateaux passaient et j’ai touché son corps parfait avec mon esprit, parce qu’il n’y avait pas d’autre opportunité”.
https://www.youtube.com/watch?v=tIssqxixYp0
Dans ce quartier du Vieux-Port, le mardi 7 novembre, soir anniversaire de la mort de Leonard Cohen et les quatre soirs suivants, l’artiste visuelle Jenny Holzer projettera en collaboration avec le MAC sur le silo n°5, une sélection d’extraits de poèmes et de chansons de l’artiste (plus d’informations ici).
Dans le centre-ville, les hommages ont commencé et vont se poursuivre
Rue Crescent depuis quelques semaines, impossible de passer à côté de la grande murale représentant Leonard Cohen (voir photo en tête d’article), tout près de l’Université McGill où il a étudié. Imposante, elle s’aperçoit depuis le Mont-Royal. Tout au long du mois de novembre et dans les mois qui suivront, la ville multipliera les hommages au chanteur icône de Montréal.
Un grand concert sera donné en sa mémoire au centre Bell le lundi 6 novembre. Adam Cohen, son fils, ainsi que Sting, Lana del Rey, Feist, Damien Rice et de nombreux autres artistes commémoreront chacun à sa façon le chanteur tout au long du spectacle intitulé “Leonard Cohen: Tower of Song“. Du 5 au 9 décembre, les Ballets Jazz de Montréal dévoileront de nouvelles chorégraphies créées en hommage à sa musique, pour le spectacle “Dance Me“.
Et bien sûr le 9 novembre, le Musée d’art contemporain (MAC) inaugurera l’exposition majeure “Leonard Cohen : une brèche en toute chose / A crack in everything“. Avec cet évènement très attendu, la ville clôturera les célébrations de son 375ème anniversaire. Le MAC proposera par ailleurs une série de cinq concerts durant lesquels des artistes interpréteront cinq albums essentiels de Leonard Cohen, notamment “Songs of Leonard Cohen” le 28 mars avec Coeur de Pirate et Ariane Moffatt.
Le plus touchant reste sans doute les témoignages spontanés d’inconnus comme le panneau de la rue Marie-Anne en face de sa maison sur le Plateau, qui n’est plus tout à fait le même depuis sa disparition.