Dans son film “Le Grand Méchant Renard et autres contes”, Benjamin Renner a adapté à l’écran ses propres bandes dessinées et tout particulièrement Le Grand Méchant Renard, primée au Festival d’Angoulême. Un second long métrage drôle et enlevé où les personnages à l’aquarelle sont des animaux mais rencontrent des problématiques bien humaines. Le film a ouvert la nouvelle édition des Sommets du cinéma d’animation de Montréal et sortira prochainement dans les salles québécoises.
Un film réalisé à quatre mains
Ce qui devait être au départ un programme d’une vingtaine de minutes pour adapter “Le Grand méchant renard” s’est vite transformé en un projet plus complexe. “Je venais de passer un an à écrire cette histoire, un long métrage c’est long, c’est ce qu’il y a de mieux pour détester un univers et une histoire et moi je voulais garder un amour avec ces personnages“, raconte le réalisateur. Lorsque son producteur lui propose d’adapter la bande dessinée, ils partent donc sur un projet court mais celui-ci s’enrichit en cours de route et finit par rassembler trois histoires. Entre temps, le partenaire de Benjamin Renner pour “Ernest et Célestine”, Patrick Imbert, a rejoint l’équipe pour co-réaliser le film.
Restait à trouver un fil conducteur. Ce seront de petites saynètes théâtrales qui ne manquent pas de charme et permettent d’assurer la transition entre les aventures du renard qui tente désespérément d’être terrifiant avec celles d’un lapin adolescent attardé, d’une cigogne tire-au-flanc, de poules qui prennent des cours d’auto-défense et d’un canard qui se prend pour le Père Noël. Entre autres…
Le dessin et l’humour pour traiter des sujets de société
Ce second long métrage, Benjamin Renner le voulait drôle et bourré de gags, moins ambitieux que le premier mais savoureux. “Ernest et Célestine c’était une pâtisserie Lenôtre et “Le Renard” un petit bonbon Krema qu’on prend presque plus de plaisir à manger”, explique-t-il.
Et c’est réussi. Dans un univers animalier inspiré notamment par Les Contes du chat perché de Marcel Aymé, les Fables de La Fontaine et l’univers de Goscinny, des personnages à contre-emploi dignes de Mario Ramos se retrouvent empêtrés dans des situations rocambolesques qui s’enchaînent rapidement à la manière des films de Tex Avery. Le tout dessiné à la main avec la délicatesse qui avait contribué au succès d'”Ernest et Célestine”.
Pour autant, le film ne se contente pas de faire rire mais aborde de vrais sujets de société ou de psychologie comme la filiation, l’éducation ou l’estime de soi. “J’aime parler de sujets lourds avec bonne humeur et légèreté“, explique Benjamin Renner.
Certains spectateurs ont également perçu dans le film, qui met en scène un renard élevant des poussins, un message sur le genre, le mariage pour tous et la GPA. Une interprétation dont le réalisateur n’a pas été forcément conscient à l’écriture mais qui correspond en tout cas au contexte de création de l’album. “Je ne sais pas si cela m’a influencé mais j’ai écrit la bande dessinée en pleines manifestations et lorsque je dessinais la scène dans laquelle les poussins s’élancent vers le renard et la poule en les appelant “mamans”, il y avait la manif pour tous qui était en train de défiler en bas de chez moi. C’était une coïncidence“, raconte le réalisateur. Il est en tout cas certain que le film transmet un message fort de tolérance et d’acceptation de soi et de l’autre.
Un projet qui débute sous forme de bande dessinée
“J’ai un projet que j’aimerais faire en animation mais n’étant pas très à l’aise dans l’écriture de longs métrages, j’aime bien passer par la bande dessinée (…)”, confie Benjamin Renner. C’est donc sur des planches de bande dessinée qu’il s’est attelé à son nouveau projet, avec des humains cette fois-ci. “Je pense que ce sera une bande-dessinée mais ce n’est pas encore sûr à cent pour cent“, précise-t-il.
Il profitera d’ailleurs peut-être de son séjour à Montréal pour parfaire, dans les librairies, sa connaissance de la bande dessinée québécoise. Guy Delisle, Chester Brown et Michel Rabagliati figurent parmi les auteurs qu’il apprécie. “J’adore les bandes dessinées de la série “Paul“. C’est très touchant, Michel Rabagliati parle de choses positives, de différents moments de sa vie, comme son premier amour, son premier job. Le personnage a une sorte de bonhomie. C’est très agréable à lire et très sincère (…). J’aime beaucoup quand un auteur est capable de reproduire la vie comme cela. C’est très vrai“.