Foulant les planches de théâtre depuis l’âge de six ans, c’est en croisant la route d’Olivier Nakache et Eric Toledano sur un spot publicitaire qu’il décroche un rôle dans “Intouchables” (l’ado chevelu avec une barrette dans les cheveux, c’était lui) et commence sa carrière au cinéma. Avec “Edmond”, Thomas Solivérès dépasse enfin son physique d’éternel adolescent et passe le cap de l’âge adulte. Nous l’avons rencontré au festival Cinemania pour cette comédie très réussie, qui sort le 8 février sur les écrans québécois.
Alexis Michalik avait déjà fait un carton et remporté 5 Molières avec sa pièce “Edmond”, qui raconte avec flamboyance et drôlerie l’écriture par Edmond Rostand — écrivain alors peu connu — de son chef d’oeuvre : “Cyrano de Bergerac”. Lorsqu’il veut prolonger ce succès au cinéma, l’auteur-réalisateur pense pour le rôle-titre à Thomas Solivérès, qui vient alors de tourner “Les aventures de Spirou et Fantasio”.
“Un soir, Alexis Michalik m’emmène au théâtre et me dit : “Je suis en train de monter “Edmond” au cinéma et je cherche mon Edmond. Et il laisse un blanc en me regardant…“, se souvient l’acteur avec un sourire. Le réalisateur le met très vite à l’épreuve pour les essais. “Il m’a lancé un petit défi parce qu’il m’a demandé de préparer sept séquences : j’avais 45 pages de texte à apprendre en deux semaines. Je pense qu’il avait besoin de voir si j’allais être prêt à tenir le choc !“.
Remportant le défi, Thomas Solivérès incarne à l’écran ce jeune écrivain à moustache qui peine à percer et doit soudain écrire une pièce à succès en quelques jours. Rostand cherche l’inspiration entre deux femmes (la sienne et une jeune costumière qui le trouble) et travaille fiévreusement, mais doute de son talent jusqu’au bout. Dès la première représentation de Cyrano, le héros au célèbre nez enthousiasme le public.
“Ce personnage m’a profondément touché, confie le jeune acteur. J’ai beaucoup travaillé sur lui, sur l’époque, j’ai fait des recherches (…). Je suis tombé sur des correspondances entre Edmond Rostand et sa femme, Rosemonde Gérard, et cela m’a bouleversé de lire des choses que je pensais moi-même sur les doutes, la confiance, l’estime de soi”. Car malgré ses apparences décontractées, Thomas Solivérès est un grand travailleur en proie au doute lui aussi.
Mais l’acteur peut se montrer confiant pour la suite de sa carrière, il est parfait dans son rôle. Il nous raconte qu’à une projection en France, l’un des spectateurs lui a avoué s’être demandé à la fin du film ce qu’il faisait là avec l’équipe du tournage. “J’aime qu’on ne me reconnaisse pas en regardant le film. Ça veut dire que c’est réussi !“, se réjouit le comédien, actuellement en tournée dans le seul-en-scène “Venise n’est pas en Italie”, pour lequel il a été nominé aux Molières.
Et pourtant, en tournant son premier bout d’essai pour “Intouchables”, d’Olivier Nakache et Eric Toledano, il avait fait un flop. “L’audition s’est très mal passée, se souvient l’acteur. Ils m’ont quand même rappelé en me disant : “on ne va pas se mentir, tu n’as pas fait un bon premier tour, mais on se souvient de toi et à notre avis il vaut mieux que tu reviennes“. Il n’avait jusqu’alors croisé les deux réalisateurs que brièvement, le temps d’un tournage publicitaire pour Castorama. On peut dire que ces deux-là ont eu du nez…