Santé mentale au Québec : comprendre le système pour un meilleur accès aux services

Santé mentale au Québec : comprendre le système pour un meilleur accès aux services

Par Marie-Hélène Dufays Marinescu / Le 20 mai 2025 / Santé

Au Québec, il existe un certain nombre de ressources pour répondre aux besoins en santé mentale. Face à un système d’accès différent de la France, le manque d’information peut être déroutant. C’est pourquoi nous avons décortiqué pour vous les mécanismes d’accès aux services. 

Actuellement, les politiques publiques québécoises de santé mentale en vigueur visent à offrir « la bonne intervention, au bon moment, à la bonne personne », explique Morgane Gabet, professeure adjointe, d’origine française, au département de gestion, évaluation et politique de santé à l’École de santé publique de l’Université de Montréal.

Pour recevoir des services adaptés et ainsi accéder au système public, il existe un guichet d’accès à la première ligne. Dans le réseau public, cela constitue la première étape pour effectuer une demande lorsque le besoin de consulter un professionnel se fait ressentir, bien que d’autres portes d’entrée existent.

Plusieurs portes d’entrée aux services publics et communautaires d’aide en santé mentale de première ligne :

  • Info-social 811, aussi appelé le 811 psychosocial, auquel on accède en composant le 811, option 2. Il s’agit du premier guichet d’accès, soit l’une des portes d’entrées pour obtenir des services en santé mentale au Québec. Selon le besoin évalué par le professionnel en intervention psychosociale, vous serez orienté vers la bonne ressource;
  • Se rendre directement au Centre local de services communautaires (CLSC) le plus proche de chez soi;
  • Utiliser le répertoire de ressources en santé mentale, qui permet de trouver divers services selon plusieurs critères, dont la localisation;
  • Consulter un médecin de famille ou se rendre dans un Groupe de médecine de famille (GMF);
  • Les organismes communautaires en santé mentale;
  • Se rendre aux urgences, s’il s’agit d’une urgence.

Les traitements offerts varient ensuite selon l’évaluation qui vous sera faite. Les services proposés peuvent inclure la participation à des groupes d’entraide et de soutien, ou d’autogestion, comme Phobie Zéro ou Relief, explique Morgane Gabet. Il peut aussi s’agir d’interventions individuelles, familiales ou conjugales, de rencontres d’accompagnement, de réadaptation, d’un suivi clinique ou d’une psychothérapie. 

Au Québec, la prise en charge en santé mentale peut aussi être effectuée par un médecin de famille ou un infirmier praticien spécialisé (IPS) en santé mentale. Ces derniers peuvent effectuer un suivi des symptômes et de la médication, le cas échéant, indique Morgane Gabet.

Aussi, afin de faciliter l’accès aux services de soins en santé mentale, les psychologues sont désormais autorisés à diagnostiquer des troubles psychologiques, confirme Christine Grou, psychologue et présidente de l’Ordre des psychologues du Québec (OPQ). Selon l’Ordre, c’est un moyen de favoriser l’accès aux soins.

Malgré une volonté d’améliorer l’accès aux soins, notamment par le biais de politiques publiques, des délais d’attente persistent. Le tableau de bord de Performance du réseau de la santé et des services sociaux indique en effet que 6 647 personnes sont actuellement en attente depuis plus de 30 jours, ce qui est considéré comme hors délai, pour un service en première ligne en santé mentale. 

Pour Morgane Gabet, la continuité des soins en santé mentale est très importante. Qu’il s’agisse d’une visite aux urgences ou d’un premier contact en première ligne, « seule une personne sur trois et, au mieux, une personne sur deux », accède à un rendez-vous de suivi dans les trois mois, précise-t-elle.

Accéder à la psychothérapie

Pour les personnes souhaitant entamer une psychothérapie en autoréférence, il est plus rapide de consulter en bureau privé. Le site de l’Ordre des psychologues du Québec (OPQ) est une bonne référence pour trouver de l’aide, mais il ne faut pas s’attendre à être contacté immédiatement, précise la porte-parole de l’Ordre.

Les délais peuvent varier, allant d’un accès rapide à plusieurs mois d’attente si l’on souhaite consulter un psychologue particulier. Il est également judicieux de veiller à vérifier le droit d’exercice d’un psychologue ou psychothérapeute en consultant l’annuaire de l’Ordre des psychologues. Au Québec, on distingue le psychologue du psychothérapeute, un professionnel de la santé mentale (travailleur social, infirmier ou sexologue, entre autres) ayant obtenu un permis de psychothérapie et satisfait aux exigences de l’Ordre.

Il faut compter entre 120 et 180$ pour une séance de psychothérapie en bureau privé, selon ce qu’indique le site de l’OPQ. Il n’y a cependant pas de barème, car chaque clinique pratique ses tarifs.

Les séances dans le système privé ne sont pas couvertes par la RAMQ. Elles peuvent cependant être partiellement prises en charge par certaines assurances collectives et par la Commission des normes, de l’équité, de la santé et de la sécurité du travail (CNESST) en cas d’accident du travail par exemple.

L’organisme Accès Psy propose quant à lui des consultations en psychothérapie à prix réduit, entre 25 et 75$ selon le revenu familial, pour un épisode de services de 20 séances. Le délai d’attente pour y accéder est actuellement de 7 à 8 mois, informe Geneviève Peck, directrice générale de l’organisme. Pour être admissible à ce service, il faut percevoir un revenu familial annuel inférieur à 70 000$ en couple ou à 60 000$ pour une personne seule. De plus, la personne ne doit pas bénéficier d’un Programmes d’aide aux employés (PAE) ou d’une assurance pour soins de santé mentale.

Pour les personnes ayant déjà entamé une psychothérapie qui leur convient en France (ou dans leur pays d’origine), la Dre Grou conseille, lorsque c’est possible, de poursuivre la thérapie en visioconférence.

Les psychologues dans le système public

Les consultations avec un psychologue dans le système public sont prises en charge par la RAMQ, pour les personnes qui sont couvertes. L’accès s’avère toutefois plus laborieux qu’en France, où il est possible de consulter directement un psychologue, sans passer par un médecin ou un guichet d’accès, car un certain nombre de consultations sont remboursées, précise Morgane Gabet.

La disponibilité des psychologues est limitée au Québec, notamment en raison de l’exigence d’un doctorat pour exercer, précise cette dernière. Toutefois, un permis de psychologue peut être délivré par équivalence à certains diplômés en psychologie issus d’autres universités, indique l’Ordre. Aussi, d’autres professionnels de la santé peuvent obtenir un permis de psychothérapeute sous certaines conditions. 

Passer par le guichet d’accès ne garantit toutefois pas l’accès à une thérapie avec un psychologue, souligne Christine Grou. Une évaluation préalable est d’abord nécessaire. Et même si l’on juge que ces services vous seront offerts, les délais peuvent varier de 6 à 24 mois, selon la Coalition des psychologues du réseau public québécois.

Consulter en psychiatrie

Afin d’obtenir des services en psychiatrie, plusieurs voies d’accès sont possibles :

  • Consulter un médecin de famille qui sera en mesure de vous rediriger vers le spécialiste
  • Passer par le guichet d’accès en santé mentale, qui est la porte d’entrée vers le réseau public
  • Se rendre à l’urgence psychiatrique, pour les situations de crise
  • Se rendre dans un centre de crise, pour un soutien immédiat en cas de situation de détresse

Au-delà de la première ligne 

En cas d’urgence, pour un soutien immédiat, il est recommandé de se rendre à l’hôpital, aux urgences ou dans un centre de crise pour obtenir du soutien immédiat. 

Pour les troubles plus graves, les suivis sont ensuite assurés dans des centres spécialisés de deuxième ou troisième ligne, selon les besoins.

Des ressources de prévention au suicide existent, tant pour les personnes en détresse que pour leurs proches : 

  • Par téléphone, le 1 866 APPELLE (277-3553), appelle correspondant aux touches du clavier pour composer la suite du numéro;
  • Par message texte, au 535353;
  • Par chat (clavardage) sur : https://suicide.ca/fr .

En cas de danger immédiat pour soi ou pour un proche, appeler le 911. 

Immigrer, c’est aussi s’adapter et réexaminer certains repères. Morgane Gabet invite les Français installés au Québec à garder l’esprit ouvert face à l’organisation des soins en santé mentale, qui diffère à plusieurs égards du système français. Cette différence, souligne-t-elle, ne signifie pas que « les portes sont fermées ». Elle encourage à s’informer et à utiliser les multiples portes d’entrée que propose le système.

DERNIÈRES NEWS

Maudits Francais

Rejoignez la communauté !

S’ABONNER À LA NEWSLETTER

CELA POURRAIT VOUS INTÉRESSER