Pour les restaurateurs de Montréal, l’espoir était revenu cet été après un printemps de confinement. La nouvelle annonce de fermeture pour tout le mois d’octobre est un nouveau coup sur la tête.
Guillaume Couraud est copropriétaire du BreWskey – Pub et Taproom, au Vieux-Port à Montréal depuis 2015. Arrivé il y a 11 ans au Québec, le jeune entrepreneur normand a doublé la superficie de son entreprise l’année dernière. « Maintenant, on a deux locaux collés l’un à l’autre : le pub puis le Taproom où il y a une brasserie, un autre bar et deux cuisines », détaille-t-il.
L’annonce du confinement en mars dernier l’a beaucoup surpris et l’a obligé à mettre à pied la majorité de son personnel. Le bar employait environ 70 personnes à l’année, un chiffre tombé à une douzaine pendant le confinement. « Le plus dur, c’est de ne pas savoir ce qui allait arriver à nos employés », se rappelle-t-il.
Une fois la Prestation canadienne d’urgence (PCU) annoncée, le restaurateur explique avoir relâché un peu la pression. C’est à ce moment-là qu’il a décidé avec les deux autres copropriétaires de mettre en place une boutique en ligne afin de vendre leurs produits brassicoles. « On brasse directement sur place et on vend nos cannettes à emporter. Ça plait beaucoup aux gens. On offre aussi quelques plats pré-préparés congelés qu’on peut faire réchauffer chez soi » raconte Guillaume.
Suite au déconfinement progressif du printemps, le Taproom a rouvert ses portes et le personnel a pu revenir travailler, même si l’été n’a pas été aussi prolifique que les autres années, notamment en raison de l’absence des touristes étrangers. « On 2019, on vendait presque 100 000$ pendant les grosses semaines d’été. Cette année, on n’a jamais dépassé les 30 000$ », déplore-t-il.
L’équipe du BreWskey – Pub et Taproom s’était préparée à une éventuelle deuxième vague et à une nouvelle fermeture des bars et salles à manger de restaurant. Même si les trois entrepreneurs arrivent à faire fonctionner l’entreprise grâce aux ventes à emporter, ils sont tout de même très déçus de devoir laisser partir une nouvelle fois leurs employés. « C’est vraiment le plus dur. Ma conjointe est en train de fouiller les annonces pour les aider à trouver du travail », poursuit Guillaume.
En ce qui concerne les aides financières prévues par le gouvernement, à savoir un pardon de 80% sur des prêts de 15 000$, le restaurateur les qualifie de « cacahuètes ». Dans un futur proche, Mr Couraud et ses collègues envisagent de mettre en place un nouveau local afin de permettre de livrer eux-mêmes leurs produits. Ils comptent aussi continuer leurs ventes sur internet, en attendant de pouvoir retrouver un jour le BreWskey – Pub et Taproom avec des clients. « Je ne pense pas que 2020 se finira bien, mais on espère qu’au milieu de l’année 2021 on puisse reprendre les choses normalement », conclut-il.
Même avis du côté de Damien Haennel, propriétaire du restaurant Le Pégase à Montréal. Lui aussi a vu fondre son nombre d’employés lors de la première vague de COVID-19. « D’habitude, on a environ 10-12 employés à l’année. Depuis le déconfinement, on engage seulement deux ou trois personnes selon les besoins. Sinon, il y a juste mon associé et moi », explique le patron.
Avant la pandémie, il ouvrait son restaurant chaque jour. Après avoir subi des pertes financières majeures lors du confinement, il a décidé de raccourcir ces jours de service. Depuis le mois de juin, Le Pégase ouvre du jeudi au dimanche. Il a aussi mis en place un service de plats à emporter pour supporter la crise. « On n’avait aucune idée de quand on allait pouvoir rouvrir. Alors on a décidé de trouver des solutions », raconte l’entrepreneur de 50 ans.
Bien que l’été lui ait permis de retrouver sa clientèle d’habitués, Le Pégase a dû diviser sa capacité en salle de 50%. Malgré une bonne affluence, le patron explique qu’il sera « impossible de rattraper les pertes ».
Sentant venir la deuxième vague, Damien Haennel a décidé de reprendre le service à emporter dès la semaine dernière. « Quand j’ai entendu qu’il y allait avoir des mesures, je savais que les restaurateurs seraient les premiers touchés », se rappelle-t-il.
Malgré une certaine déception vis-à-vis des nouvelles mesures restrictives et un sentiment de pessimisme sur la situation sanitaire dans les prochains mois, Mr Haennel pense pouvoir s’en sortir, notamment grâce à l’ancienneté de son restaurant.
« Ça fait longtemps qu’on est là, on a une clientèle fidèle. On s’en sortira peut-être mieux que d’autres qui jouent sur les touristes, conclut-il. Mais c’est sûr que ce n’est facile pour personne ».