L’une est en train de devenir psychoéducatrice; l’autre orthophoniste; la troisième journaliste. Si elles étaient restées en France, elles n’auraient sans doute jamais franchi le pas. Mais l’expatriation à Montréal les a décidées. Comme Charlène, Hélène et Esther, nombreux sont celles et ceux pour qui l’expatriation est l’occasion de reprendre ses études. Un nouveau départ n’est certes pas toujours facile, mais il a été “super enrichissant” pour les trois jeunes femmes.
Que l’expatriation soit activement choisie, ou qu’elle survienne par exemple pour suivre un conjoint, elle créé une rupture qui permet de porter un regard neuf sur sa carrière, et ses envies.
Peu de temps après son arrivée au Québec, Charlène trouve un poste d’éducatrice dans des écoles spécialisées en déficience intellectuelle et trouble du spectre de l’autisme. « Là-bas, j’ai rencontré une psychoéducatrice. En parlant avec elle, j’ai compris que c’était ce que je voulais faire », raconte-t-elle. Mais elle craignait de se lancer dans de longues études. Elle décide alors de consulter une conseillère d’orientation à l’Université de Montréal (UdeM). « Elle m’a fait prendre conscience que j’avais encore de nombreuses années à travailler dans un métier que je n’aime pas d’ici ma retraite », confie-t-elle.
Hélène était elle professeure de Sciences Economiques et Sociales. Arrivée à Montréal, elle découvre que cette matière n’existe pas ici dans le secondaire; les postes dans les Cégeps sont par ailleurs très limités. Elle renoue alors avec un vieux projet: en France, elle avait envisageait d’étudier l’orthophonie, mais à l’époque, les programmes étaient très sélectifs. « Ici, pour rentrer à la maîtrise en orthophonie, tu peux avoir n’importe quelle bac (licence) », explique-t-elle.
Pour Esther, c’est la possibilité de reprendre des études tout en travaillant qui a été un déclencheur. Educatrice spécialisée depuis 2009, elle s’est inscrite en septembre dernier au certificat en journalisme de l’Université de Montréal (UdeM) à temps partiel. Cette formation courte de trente crédits (environ dix cours) est dispensée en cours du soir à la Faculté de l’éducation permanente. « Le journalisme a toujours été dans un coin de ma tête, j’ai toujours voulu comprendre et participer au monde », explique-t-elle.
Même si les possibilités permettent de se former de manière flexible, le coût d’une reprise d’études est à considérer. Une variable qui dépend notamment de son statut dans la province.
« Si je n’avais pas eu le soutien de mes parents, je ne l’aurais pas fait », confie Charlène pour qui la première année de baccalauréat à temps plein a coûté environ 4000 $ par session (semestre). Ce montant a diminué tout de même de moitié lorsqu’elle est devenue résidente permanente. Ce nouveau statut lui donne aussi droit aux « prêts et bourses ». Même si elle continue à travailler comme éducatrice en parallèle, ce coup de pouce est non négligeable pour elle.
Même si Esther bénéficie de tarifs avantageux comme résidente permanente du Québec, c’est notamment grâce à ses économies qu’elle a pu aborder son retour sur les bancs de l’université.
C’est également avec ses économies mais aussi grâce à l’aide de sa grand-mère qu’Hélène finance sa formation qu’elle a tout de même estimé à 15 000 $ (en permis d’études). A ce montant, elle inclut le prix des cours de préparation à la maîtrise (propédeutiques) qu’elle suit actuellement. Pour réaliser ce projet, elle a aussi contracté un prêt étudiant en France et compte travailler à temps partiel pendant le reste de ses études.
Pour les trois jeunes femmes, reprendre des études n’est pas toujours tout rose et elles doivent faire attention à ne pas brûler la mèche par les deux bouts. Hélène confie d’ailleurs que même si c’est très enrichissant, cela demande un certain courage.
Esther admet que malgré l’aspect pratique des cours du soir, il est parfois difficile de maintenir son attention après une journée de travail. Même elle avait anticipé ce retour financièrement, elle ne se souvient pas s’être imaginé que ce serait aussi prenant.
Pour des raisons financières, Charlène a dû prendre un deuxième travail de serveuse le soir et le week-end. « Avec la fatigue, j’ai un peu négligé les cours et je n’arrivais plus à m’organiser, j’étais épuisée », avoue celle qui termine son baccalauréat en avril et débute sa maîtrise en septembre. Mais même si cela lui demande beaucoup de sacrifices et de remises en question, elle considère que ça fait partie du chemin pour atteindre ses objectifs. Elle affirme d’ailleurs ne pas regretter son choix.