(Cet article été publié par Emmanuel Langlois dans le Journal des Français à l’étranger)
Le Québec est-il en voie de Trumpisation et de rejet des étrangers comme son voisin états-unien ? Le gouvernement fédéral canadien a en tout cas décidé l’an dernier de réduire de plus d’un tiers (35%) le nombre de permis d’études accordés aux étudiants étrangers. Le plafond a même encore été abaissé de 10% depuis. De son côté, le Québec vient d’instaurer pour la première fois des quotas d’étrangers autorisés à venir y suivre leurs études.
« Il faut des réajustements, s’alarme Rémi Quirion, scientifique en chef du Québec et chargé de conseiller le gouvernement. On essaie d’enlever cette restriction-là en particulier pour les étudiants en maîtrise et en doctorat. » Selon le scientifique, les étudiants québécois ne sont pas suffisamment nombreux pour remplir certains cursus dans les universités, publiques pour la plupart, et dont le financement pourrait aussi pâtir de la pénurie d’étudiants étrangers. A part les Français qui bénéficient d’un régime d’exception, tous les autres paient en effet des droits d’inscription deux à trois fois plus élevés que les Canadiens.
Un besoin de freiner l’immigration
Le nombre de PVT (Permis vacances travail) a lui aussi été revu à la baisse ces dernières années, se désole Julie Meunier, présidente de l’association française PVTistes.net : « Chaque année, le quota est en moyenne de 7 000 places pour les Français. Jusqu’en 2023, le Canada réinjectait des places non utilisées par d’autres pays. Cette année, ils ont baissé à 6 615. Il reste aujourd’hui 47 places pour tout 2025 pour plus de 16 000 candidats français ! On sent un besoin de baisser l’immigration. »
Cette affluence crée en tout cas un bouchon, car les recalés s’inscrivent à nouveau au tirage au sort l’année suivante, en plus des nouveaux candidats.
Numérique et intelligence artificielle
Le rapport du cabinet de conseil en management Volume 10 pointe ainsi une baisse de 45,9% des demandes d’admission d’étudiants étrangers dans les universités québécoises. « Le Canada a peut-être un peu trop ouvert ses frontières ces dernières années, reconnaît le professeur Quirion, ce qui a mis la pression sur le logement ou les soins et services de santé dans certaines petites villes comme Saguenay ou Rimouski. Il y a peut-être eu des abus de gens qui venaient avec un visa étudiant et demandaient ensuite la résidence permanente au Québec. »
Le scientifique s’inquiète aussi de la pénurie d’étudiants indiens, marocains ou algériens, les nationalités les plus représentées dans des secteurs de recherche de pointe comme le numérique ou l’intelligence artificielle. D’autant qu’une partie d’entre eux s’installent ensuite au Québec pour travailler dans l’industrie dans ces domaines d’avenir.
Rémi Quirion espère que l’arrivée du nouveau Premier ministre canadien Mark Carney permettra d’obtenir un assouplissement de ces quotas dès la rentrée prochaine en septembre.