Il y a un an exactement, Angèle montait sur la scène des Francos pour la première partie d’Hubert Lenoir. Depuis la sortie de sa première chanson et de son premier clip pour “La Loi de Murphy” (12 millions de vues sur YouTube), la jeune chanteuse belge de 22 ans a gagné le cœur de millions de fans. Avec son premier album “Brol”, elle admet avoir parcouru un long chemin et se félicite de cette “aventure extraordinaire”.
Née à Uccle en Belgique, Angèle est la fille du guitariste Marka et de l’humoriste belge Laurence Bibot. C’est dans la banlieue sud de Bruxelles qu’elle a grandi et appris à jouer du piano. Son premier amour ? Le jazz, qu’elle a étudié au Jazz Studio d’Anvers, développant ainsi sa prédilection pour le clavier.
Pour “Brol”, tout commence par une journée pluvieuse, “typique bruxelloise”. Angèle se rend chez le chanteur Veence Hanao. “Je suis arrivée par ma journée très difficile (rires). On a beaucoup ri de ma capacité à me plaindre de choses pas très graves.” Il n’en fallait pas plus pour écrire “La loi de Murphy”, la première chanson de l’album.
Avec ses cheveux blonds et ses traits fins, Angèle impressionne. Pourtant, elle joue avec les mots avec naturel, humour et auto-dérision. Au contraire de la majorité des artistes flamands, elle chante en français. Un choix qui s’est fait “naturellement” : la jeune chanteuse voulait écrire dans sa langue maternelle, sans “avoir une stratégie pour se faire connaître.”
Choisir le français se répercute sur sa popularité à l’international. “Je n’ai jamais voulu aller plus loin que la francophonie”, explique-t-elle. “J’accorde beaucoup d’importance aux textes. Je n’imagine pas raconter mes histoire à un public qui ne comprendrait pas ce que je chante !”
L’autre atout d’Angèle : sa créativité et son aisance sur scène. Ses clips, dont certains ont été réalisés par Charlotte Abramow parlent d’eux-mêmes et racontent encore une autre histoire. On la retrouve ainsi jouant avec un ballon en forme de globe oculaire dans “Je veux tes yeux” ou en braqueuse glamour dans “La Thune”. Sur scène, elle manie le clavier et le micro, entourée de quatre danseuses, d’un batteur et d’un claviériste. Ce qui ne l’empêche pas de se mêler aux danses, et de chauffer la salle à chaque chanson.
Les textes d’Angèle reflètent l’époque. Drôles, ironiques, tendres ou engagés, elle “parle du présent et de [son] présent”, toujours avec une “écriture simple et sincère”. Plus qu’un message politique ou engagé, Angèle recherche la sincérité. “Que je parle de la paresse d’un samedi soir ou de sexisme, j’essaye d’être sincère, de transmettre mes émotions au public.” Sa musique, qui varie les styles, entre électro, pop, quelques touches de reggae ou de steel drums caribéens, joue aussi sur un rythme simple et épuré.
Dans “Brol”, Angèle est éclectique. Avec “Je veux tes yeux”, “La Thune” ou “Jalousie”, elle aborde un thème central de l’album : les réseaux sociaux, la culture du narcissisme et ses pièges. Mais la jeune chanteuse montre aussi une autre facette, plus romantique, nostalgique et introspective. Avec “Les matins”, elle signe une chanson bien sentie sur le manque de l’autre les lendemains de rupture. Il y a aussi “Nombreux”, une vraie chanson d’amour à l’ancienne avec son piano romantique et ses jolies envolées vocales et “Ta reine”, un titre sensible sur l’homosexualité féminine.
Avec “Balance ton quoi”, Angèle s’engage et ajoute son grain de sel féministe à l’album. Cette critique tout en “fausse douceur” dénonce la misogynie, notamment en vogue dans le milieu du rap francophone.
“Ils parlent tous comme des animaux/De toutes les chattes ça parle mal
2018, je n’sais pas c’qu’il te faut/ Mais je suis plus qu’un animal
J’ai vu qu’le rap est à la mode/ Et qu’il marche mieux quand il est sale
Bah faudrait p’t’être casser les codes/ Une fille qui l’ouvre ça serait normal
(…) Même si tu parles mal des filles je sais qu’au fond t’as compris.”
“Balance ton quoi”, c’est d’abord “un état des lieux”, explique la jeune chanteuse belge, qui a choisi de se documenter pour aller plus loin que ce qu’elle peut vivre au quotidien. “J’ai voulu comprendre ce que toutes les femmes peuvent subir”, continue-t-elle. Son arme pour dénoncer le sexisme ? L’humour. Car pour elle, la musique doit rester “un divertissement”. “C’est assez chouette, l’humour apporte de la légèreté. S’amuser et réfléchir peuvent se combiner grâce à l’humour.”
“De toutes les chansons de l’album, c’est celle pour laquelle j’avais le plus d’appréhension”, confie-t-elle. Angèle confesse également qu’elle a été surprise par l’effet levier qu’a eu le clip. Sorti 6 mois après la chanson, il a permis “d’offrir une vision plus inclusive, moins personnelle du message féministe“.
Tout y passe : le poil sous les bras, la longueur des jupes, le harcèlement au travail, les sous-vêtements, les poitrines nues, le consentement, les disparités salariales, les relations entre les deux sexes et le travail domestique. On la voit apparaître tour à tour dans la peau d’une juge au sein d’un tribunal, ou d’une instructrice à la “Anti Sexism Academy”, où l’un de ses élèves est incarné par Pierre Niney. “Quand une fille dit non, c’est… non. Il faut que ce message soit définitivement intégré”, martèle Angèle.
Angèle aime le live. Une fois écrit, composé, produit, mixé et sorti, on ne peut plus toucher à l’album, regrette-t-elle. Alors qu’un concert annonce toujours des surprises : “on ne sait pas à quelle chanson le public va réagir, on peut faire quelques arrangements… C’est un véritable partage, jamais figé.”
Alors pas de panique si vous n’avez pas pu avoir de places pour son concert aux Francos de Montréal. Car Angèle revient pour un show au Centre Bell le 13 décembre. Tenez-vous prêt, les places risquent de partir comme des petits pains dès vendredi 21 juin, 12h.