Armand du Verdier, 25 ans, a l’impro dans la peau. Arrivé au Québec en 2011 pour ses études, il est devenu consultant en milieu organisationnel. La prise de parole, le renforcement d’équipe et les « compétences douces » (associées à la personnalité de chacun), c’est son métier voire son dada. Il n’a donc pas pu s’empêcher de prendre les commandes de la Rocambolesque, un organisme à but non-lucratif. Le but ? Développer l’improvisation théâtrale à Montréal. Ce 17 septembre, rendez-vous avec sa nouvelle troupe, les Flying Frenchmen, au bar de La Marche à Côté (Métro Laurier).
« Le concept de la troupe c’est de proposer un spectacle d’improvisation à saveur française », lance Armand, originaire de Dijon. Mais encore ? « C’est à dire que tous les membres de l’équipe, dont je fais partie, viennent de France et ont eu la chance de pouvoir bénéficier de l’improvisation théâtrale comme tremplin d’intégration au Québec », raconte le passionné qui souhaite transmettre l’expérience à un public ouvert et prêt à s’amuser.
Au programme du spectacle : 6 à 8 voyageurs et voyageuses se retrouvent successivement dans la salle d’embarquement de l’aéroport Pierre-Elliot Trudeau de Montréal. Menés par un·e commandant·e de bord, ils vont découvrir en même temps que les autres passagers (le public) leurs multiples destinations au fil des improvisations. Accrochez vos ceintures… Fous-rires assurés.
Un aperçu de ce qui vous attend :
https://www.facebook.com/LaRocambolesque/videos/10156630388859294/
« On s’adresse aussi bien aux nouveaux arrivants qui cherchent des activités pour faire des rencontres qu’à un public local qui serait curieux d’en découvrir davantage sur nos expériences, le tout à travers l’impro », confie Armand qui en connaît un rayon sur la pratique théâtrale au Québec et en France.
Après avoir rappelé que la Ligue Nationale d’Improvisation (LNI) avait fêté ses 40 ans en 2017, il nous a aussi précisé qu’il s’agissait de la toute première ligue à avoir inventé le concept de match d’impro. « Son principal créateur, Robert Gravel, avait constaté que le public québécois préférait aller voir le hockey plutôt que le théâtre. Il a donc décidé d’apporter le hockey sur scène pour attirer son public, en reproduisant tout le décorum avec les bandes, l’arbitre, les équipes, les votes après chaque impro, les tenues de match, etc. Depuis le concept s’est propagé partout au Québec et dans le monde francophone, et parfois même au-delà ».
Raison pour laquelle il existe aujourd’hui des ligues adultes un peu partout au Québec, la plupart à Montréal mais également dans la ville de Québec et parfois en région. « C’est une activité également très présente au secondaire et au cégep. La grande majorité des établissements scolaires propose une activité d’improvisation à leurs étudiants. Ce qui fait que beaucoup de Québécois·es ont déjà touché de près ou de loin à cette discipline », rapporte le Français avant de préciser qu’en 2016 la LNI a obtenu la reconnaissance de la discipline comme fleuron de la culture québécoise par l’Assemblée nationale. Un bel accomplissement.
De l’impro à vocation sociale
À la Rocambolesque, cela fait presque 15 ans que différents concepts d’impro, plus ou moins inspirés du match, sont proposés. « Notre mission est davantage à caractère social : nous souhaitons donner l’opportunité à quiconque souhaitant improviser d’avoir une plateforme d’expression », lance simplement Armand, spectateur des bienfaits que l’impro peut apporter dans la vie d’une personne.
Lui-même a d’ailleurs commencé l’improvisation dès son arrivée au Québec en 2011, il n’en avait jamais fait en France auparavant, si ce n’est un peu de théâtre dans la troupe de son lycée. « À l’époque où j’avais commencé à faire du théâtre, cela avait été une révélation pour moi : j’arrivais à m’extérioriser sur scène et j’en ressentais le bénéfice en dehors. De nature introverti — je le suis toujours, mais je le vis différemment —, j’ai pu davantage m’ouvrir ».
Dès qu’il a su qu’il partait vivre au Québec, il a cherché où et comment faire de l’impro une fois sur place. « J’ai pris quelques cours et ateliers, et puis j’ai finalement atterri à la Rocambolesque, dont je m’occupe à présent ! », raconte le diplômé d’HEC Montréal pour qui l’intégration n’a pas toujours été évidente. « Je me sentais souvent en décalage avec les étudiants français, et les différences culturelles avec les étudiants québécois m’empêchaient parfois de créer de réelles relations. Heureusement j’ai pu rapidement commencer l’impro, qui m’a beaucoup apporté socialement », confie celui qui se sentait plus à l’aise dans un milieu où les gens n’appartenaient pas tous au « même moule ». Il avait d’ailleurs profité de son passage dans l’établissement pour lancer La LICHE, la ligue d’impro d’HEC Montréal.
C’est aussi grâce à l’impro qu’il a pu rencontrer ses meilleurs amis et même sa petite-amie. « J’ai pu franchir quelques barrières culturelles, notamment celles du langage : je ne compte plus le nombre de fois où, à mes débuts, je me suis retrouvé sur scène sans comprendre une once de ce qui se passait de l’histoire. On s’adapte à la dure ! », se souvient Armand qui estime que c’est grâce à l’impro qu’il a pu s’intégrer sereinement au Québec.
Depuis ses débuts dans la discipline, le jeune homme avoue qu’il avait ce rêve caché de constituer une équipe française. Le projet des Flying Frenchmen s’inscrit dans un désir de partager deux éléments qui caractérisent les membres de la troupe : leur identité française et leur passion pour l’impro. “Nous nous adressons bien sûr à la communauté française, à qui l’on souhaite de vivre les mêmes expériences que l’on a vécues à travers l’impro, mais également à un public local (…). J’ai beaucoup d’amis québécois qui sont toujours contents d’en connaitre davantage sur notre culture, entre deux gentilles moqueries sur nous. »