Le Ramadan s’est terminé le vendredi 15 juin 2018 au Canada et en France. Ce jour là, les musulmans se sont vêtus de leurs plus beaux habits traditionnels pour la prière de l’Aïd al-Fitr. Cette tradition est chère au propriétaire de la boutique Takwa, l’une des rares à proposer des vêtements islamiques d’inspiration américaine et européenne. Un mélange logique pour cet entrepreneur à la triple nationalité : Algérienne, Canadienne et Française.
“Casquette à l’envers et en qamis, ça fait original !” En effet, Abderazak ne correspond pas vraiment au cliché que l’on se fait du responsable d’un commerce musulman. A mi-chemin entre le style hip-hop et oriental, l’homme de 28 ans – d’une mère Française et d’un père Algérien – assume ses différentes influences venues du Maghreb, d’Europe et d’Amérique.
“Je suis un agent secret, j’ai les trois passeports si je veux ! C’est une force. Je suis Canadien, mais je suis tellement proche de ma famille française que je connais très très bien la France. Et je suis Algérien par le sang, ça vient avec, on n’y peut rien !”, plaisante-t-il.
C’est justement en France que cet ancien danseur – “toujours hip-hop à l’Américaine” – a trouvé son inspiration pour ouvrir sa boutique islamique à Montréal : “Ce que tu vas trouver dans une boutique musulmane en France, tu vas le retrouver chez moi, que ce soit les livres, les styles vestimentaires, les produits naturels, les muscs, les parfums… Il n’y avait rien ici !”
L’entrepreneur est parti d’un constat : le manque de variété dans les vêtements pour musulman·e·s vendus à Montréal. “Quand je cherchais des vêtements pour moi-même, il n’y en avait pas ! Je ne voulais pas croire qu’il n’y avait que du noir, du blanc, du gris… Où étaient les couleurs ? Pour la femme, c’était redondant. Il n’y avait pas le style à l’européenne avec des coupes cintrées ou des styles ultra larges”, explique-t-il.
Après avoir lancé sa marque de vêtement, le jeune homme décide d’ouvrir son propre commerce. Située à Cartierville, la boutique Takwa – le nom vient du mot arabe “piété” – propose des modèles de djellabas pour hommes et femmes venus du Maroc, de Dubaï ou du Pakistan. Des vêtements colorés aux coupes à la mode qui font le bonheur des musulmans, mais aussi des Québécois qui cherchent des vêtements confortables.
“Ma clientèle, il y en a de toutes les sortes : des Haïtiens, des Latinos, des évangélistes chrétiens qui aiment magasiner chez nous pour prendre des robes longues parce que ça répond à leurs critères. Même un bon Québécois, quand il voit nos joggings longs, il pète un câble ! Tu mets ça au chalet, c’est bien, c’est chaud, c’est confortable ! On s’est vraiment adaptés selon la communauté locale”, raconte Abderazak avec un grand sourire qu’il ne quitte rarement.
Pour attirer les clients dans son commerce, le propriétaire n’hésite pas à se mettre en avant dans des vidéos publiées sur Facebook ou Instagram où l’humour se mêle à des conseils stylistiques mais aussi spirituels. Un mélange des genres qui change de l’image du religieux renfermé sur lui-même : “Il faut arrêter d’être dans les extrêmes, il y a de très belles zones grises, et ce sont même des zones de couleurs en fait. Tant que nous sommes dans le licite, il n’y a pas barrières à se mettre.”
Aujourd’hui, Abderazak Tazamoucht continue de développer sa marque. Il a écrit sa propre bande dessinée à destination des enfants : Takwaman. “C’est un personnage pour leur apprendre la religion, une personne impliquée et qui aime les gens”, précise-t-il. Pour se diversifier lors de l’Aïd al-Fitr, sa boutique a vendu des lanternes, des piñatas et installé des jeux gonflables. Son but ultime ? “Si je pouvais être le Ikea musulman, ça serait beau.” Inch’Allah.