Cet été aura un goût particulier, une saveur de jamais-vu qui contraint la plupart des résidents du Québec à envisager des vacances à domicile. Et si c’était l’occasion de voyager à travers les mots des auteurs québécois pour goûter au plus près à la langue, aux histoires et aux territoires des « gens du pays » ? « La littérature québécoise est riche d’auteurs de tous horizons, de tous genres, fiers de leurs racines, c’est une belle diversité», souligne Billy Robinson, chroniqueur littéraire et libraire à Montréal, à la librairie de Verdun. Alors, bouclez vos bagages pour un road-trip littéraire qui vous transportera d’un bout à l’autre du Québec.
Majestueuse Gaspésie
Dans la baie de Gaspé, une jeune capitaine disparaît à bord de son homardier. Joaquin Moralès, enquêteur d’origine Mexicaine est mandaté sur place pour mener l’enquête. Ainsi débute La mariée de corail de Roxane Bouchard (Libre expression, juin 2020), un roman noir qui incarne plus le mystère poétique que la grosse enquête d’un thriller. Avis aux amoureux de la belle écriture: « c’est mon incontournable de la saison, confie Billy Robinson. Ça donne le goût d’aller découvrir les côtes gaspésiennes». Au nord, la péninsule est entourée des eaux du Saint-Laurent, un fleuve régulièrement au cœur des histoires québécoises.
Le Saint-Laurent, un lieu de rendez-vous incontournable
« Ce fleuve, c’est le centre du Québec, ce qui nous traverse », raconte Billy. Dans son premier roman, Pas même le bruit d’un fleuve (Alto, mars 2020), la poétesse Hélène Dorion parle de l’union de deux drames qui se sont passés sur le fleuve, une histoire de famille qui relie la petite histoire à la grande. Avec ses mots magnifiques, l’auteure nous fait remonter le siècle comme le cours du fleuve, de Montréal à Pointe-au-Père dans le Bas-Saint-Laurent.
C’est aussi bordées par ce fleuve que se dressent Les falaises (La Peuplade, février 2020) de Virginie DeChamplain. V, une jeune femme de Montréal qui ne voulait plus retourner en région, est ramenée sur ses terres d’enfance. Sa mère a été retrouvée morte au bord d’une plage de Gaspésie, elle doit vider la maison familiale. Mais la découverte des carnets secrets de sa grand-mère va la faire voyager bien plus loin que prévu.
« Au Québec, on tente toujours de se démarquer avec des histoires originales », note le chroniqueur littéraire. Parmi ces voix plurielles d’écrivains, celles issues de la culture autochtone résonnent désormais avec une visibilité nouvelle et une reconnaissance incontestable.
Le souffle des voix autochtones
Kukum signifie grand-mère en langue innue. C’est aussi le titre du roman tout en sensibilité de Michel Jean publié chez Libre expression (septembre 2019) et finaliste du Prix France-Québec 2020. Le livre retrace l’histoire hors normes d’Almanda Siméon, son arrière grand-mère. Amoureuse d’un Innu cette jeune orpheline va partager la vie des Innus de Pekuakami dans la région du Saguenay Lac Saint-Jean.
Les femmes prennent leur place aussi en écriture. “Elles ont souvent des voix très très forte” témoigne Billy Robinson. C’est avec une voix pleine d’humanité et beaucoup de puissance que Naomi Fontaine entend faire partager le quotidien d’une réserve innue sur la Côte-Nord, qu’il s’agisse de ses personnages dans Kuessipan (Mémoire d’encrier, septembre 2013), son premier roman écrit à 23 ans, ou encore celui d’une enseignante de français dans Manikanetish (Mémoire d’encrier, septembre 2017).
Ces voix autochtones ne seraient pas complètes sans leur doyenne, la voix sage et profonde de la poétesse Joséphine Bacon, innue originaire de Pessamit sur la Côte-Nord du fleuve, dont l’œuvre a été récompensée à de multiples reprises et qui écrit dans son recueil Uiesh Quelque part (Mémoire d’encrier, août 2018):
J’ai tant de plis sur mon visage Nushitshikuen anumat
Chacune de mes rides Nukuan nitinniun nitashtamikut
A vécu ma vie Nukuan ka ishinniuian
Aujourd’hui je suis la femme digne Kashikat nikukuminashiun
Qui raconte Nitipatshimun