L’annonce du projet de loi 9 a eu l’effet d’une bombe ce jeudi 7 février 2019. Parmi les mesures présentées, le gouvernement du Québec a décidé d’éliminer 18 000 demandes d’immigration encore non traitées.
“Sous réserve d’une exception, le projet de loi met fin à toute demande présentée au ministre dans le cadre du Programme régulier des travailleurs qualifiés (PRTQ) avant le 2 août 2018, et pour laquelle il n’a pas encore pris de décision de sélection, de refus ou de rejet au moment de la présentation du projet de loi”, indique le préambule du projet de loi comme le rappelle Radio Canada.
Les personnes ayant déposé leur dossier pourront être remboursées mais “aucuns dommages-intérêts ni aucune indemnité en lien avec une telle demande ne peuvent être réclamés au gouvernement”.
Quid de celles et ceux qui attendaient, parfois depuis des mois voire des années, de venir s’établir au Québec ? Ils devront recommencer à zéro. “Ce qu’on fait, c’est qu’on rembourse les dossiers et qu’on invite les gens, qui veulent venir au Québec, à appliquer dans le système de déclaration d’intérêt qui n’avait pas vraiment été utilisé à ce jour”, a expliqué Simon Jolin-Barrette, Ministre de l’Immigration, de la Diversité et de l’Inclusion.
“Le Fédéral a vécu un “nettoyage” similaire il y a quelques années ! C’est, semble-t-il, le moyen le plus rapide de se débarrasser d’un nombre trop important de dossiers et de reprendre la main sur les délais de traitement qui dépassaient tout entendement”, nous a rapporté une source anonyme.
Désormais, pour s’établir dans la Belle Province, il faudra que son profil économique corresponde aux besoins du marché du travail québécois, au risque de se voir refuser le processus officiel d’immigration. Le but de ce projet de loi ? “Réparer un système d’immigration déficient” selon les termes du gouvernement Legault. Mais aussi sélectionner des immigrants qui correspondent aux besoins réels de main d’oeuvre et “redonner à Québec la capacité d’imposer ses conditions pour la résidence permanente”. Cela faisait d’ailleurs partie des promesses de campagne du Premier ministre québécois.
Au programme également : un test de français et un test des valeurs québécoises exprimées par la Charte des droits et libertés de la personne.
“Pour s’établir au Québec avec le Programme régulier des travailleurs qualifiés, un immigrant devra donc à l’avenir signaler son intérêt au ministère de l’Immigration, être invité à faire une demande d’immigration formelle, payer les droits exigés et voir son dossier examiné avant d’obtenir en fin de parcours son certificat de sélection du Québec (CSQ). Ce certificat est nécessaire pour appliquer auprès d’Ottawa afin d’obtenir la résidence permanente permettant de venir s’établir au Québec”, peut-on lire ici.
” (…) le monde s’écroule autour de moi”
Dès l’annonce du projet de loi, les réactions se sont multipliées notamment sur ce groupe Facebook qui réunit des Français, Belges et Suisses au Canada. “Donc voilà, 20 mois d’attente pour mon CSQ, un permis de travail qui finit dans une semaine, et le monde s’écroule autour de moi. J’invite les gens qui sont au Québec dans ma situation à se manifester, pour intenter un recours collectif contre le gouvernement”, a écrit l’une des membres dont le message a généré, en l’espace de quelques minutes, plusieurs centaines de commentaires.
Parmi eux, des messages de sidération et de soutien :
-“C’est totalement déplorable, inadmissible. Je suis outré par ce genre de décisions de la part du gouvernement ! C’est toute une vie, tout un avenir qui s’écroule pour moi… Je reste sans mot face à cela”
-“22 mois que mon CSQ est en cours et 0 nouvelle ! (…)”
-“C’est dommage ! Nous sommes des milliers de personnes qui avons investi de l’argent dans les traductions et la certification de documents, plus le paiement des frais…”
-“Je vous suis pour un recours collectif ! (…) Un peu plus de 13 mois d’attente pour ma famille et moi ! Et un PVT qui se finit dans quelques mois !”
En entrevue à Radio-Canada et tel que précisé ici, l’avocat spécialisé en droit de l’immigration Stéphane Handfield a dit ne pas être surpris par l’annonce du ministre, mais il ne la juge pas moins “inacceptable” pour tous les candidats à l’immigration qu’il abandonne. “Je pense que le gouvernement du Québec risque de recevoir une poursuite ou quelques poursuites de ces candidats à l’immigration, parce que c’est des dommages assez considérables qui leur sont posés aujourd’hui”, a-t-il poursuivi, en évoquant les “sommes importantes” qu’ils ont engagées dans ce processus.
Au Devoir, l’élue libérale Dominique Anglade a estimé que la réputation du Québec sur la scène internationale en pâtira. “C’est un projet de loi d’abord très inhumain”, a-t-elle lâché après avoir dénoncé “la décision du gouvernement caquiste de faire table rase des 18 000 dossiers non traités, qui concerneraient environ 50 000 personnes.”
Si vous êtes concernés par ce nouveau projet de loi, écrivez-nous à [email protected] pour nous faire part de votre témoignage.
À suivre…