La dernière fois que Lambert Wilson s’est frotté au public québécois, c’était en 1997 pour son spectacle “Démons et Merveilles”. Cette fois, l’acteur devenu chanteur revient chanter mais aussi raconter, Yves Montand, le temps de 11 représentations au Théâtre du Nouveau Monde du 24 octobre au 5 novembre.
Conçu et mis en scène par Christian Schiaretti (directeur du TNP de Villeurbanne), le spectacle prolonge l’hommage rendu à Montand par Lambert Wilson l’année dernière lors du 25ème anniversaire de sa mort, avec son album Wilson chante Montand. Sur scène, une trentaine de chansons, arrangées par Bruno Fontaine, sont accompagnées de textes et poèmes (de Jorge Semprun et Jean Cocteau notamment) qui racontent la vie d’Ivo Livi, immigré italien devenu le célèbre chanteur et acteur à la silhouette reconnaissable entre toutes.
“C’est une traversée des grands thèmes de sa vie : Marseille, la vie ouvrière, la pauvreté, le rêve de l’Amérique, les femmes…“, raconte Lambert Wilson. La force de l’ambition et du rêve d’Yves Montand, qui lui a permis de dépasser sa condition d’immigré italien pauvre en France, touche l’artiste français. “Ce n’est pas seulement une immigration qui s’adapte, s’intègre mais qui se dépasse par un effort surhumain“, analyse-t-il. “Dès que je pense à Montand, je pense à cette force qui l’a fait sortir de la boue, de la misère. Cela me touche particulièrement car mon père, qui est né à une semaine d’intervalle, avait le même sursaut d’énergie qui venait du désespoir, de la misère. C’était une génération marquée par la guerre qui a vraiment voulu s’en sortir.” Cette force ambitieuse, séductrice, permettra même à Montand de conquérir l’Amérique dont il rêvait, enfant, à Marseille.
Pour le choix du répertoire, Lambert Wilson a choisi de tout remettre à plat sans reprendre tous les titres de l’album. “On a choisi, avec Bruno Fontaine, une trentaine de chansons qui étaient nos favorites mais qui n’étaient pas nécessairement les plus connues, loin s’en faut“. Ainsi, à côté de classiques comme La Bicyclette, Les Feuilles Mortes ou À Paris, le public découvre d’autres trésors moins connus au pouvoir évocateur fort, comme La Grande Cité qui plante le personnage en ouvrant le spectacle. “L’ancrage dans le passé pauvre et ouvrier est fondamental pour comprendre le personnage de Montand“, souligne Lambert Wilson qui se réjouit d’avoir choisi un tel personnage scénique pour remonter chanter sur scène. “Il a marqué par ses interprétations mais c’est aussi un héros. Il y a un aspect romanesque dans sa vie qui dépasse l’interprétation des chansons“.
Dans son interprétation vocale justement, Lambert Wilson a choisi de ne surtout pas tenter d’imiter Yves Montand. “J’ai très peu regardé ses vidéos et une fois que les chansons étaient choisies, je ne les ai plus réécoutées“. Son élégance et sa tessiture, la même que celle de Montand, suffisent pour qu’il s’approprie son répertoire, lui qui partage son amour des mots.
Ayant des attaches amicales à Montréal et de multiples souvenirs puisqu’il y est venu à la fois pour tourner des films et pour chanter, Lambert Wilson rend hommage à son public. “Ce que j’adore à Montréal, c’est qu’on a l’impression que le public québécois est moins prompt à immédiatement critiquer ou juger”, confie-t-il avant d’ajouter qu’il garde d’ailleurs un très beau souvenir de l’accueil chaleureux que le public montréalais lui avait réservé pour son spectacle “Démons et Merveilles” en 1997.
“Il est plus dans la jubilation et dans la connexion. Quand j’avais fait Démons et Merveilles, toutes les attentions comiques qu’on avait voulu mettre dans le choix des chansons avaient été exactement comprises à Montréal, alors que les Français étaient un peu pompeux. Pour moi, cela révèle beaucoup de finesse car toutes les attentions sont reçues à cent pour cent et je me réjouis beaucoup de revivre ça“.