Après Hollywood et l’affaire Weinstein, le Québec aussi a fait face à des scandales d’agressions sexuelles via notamment Eric Salvail et Gilbert Rozon, deux personnalités importantes du milieu culturel québécois. Des révélations peu surprenantes pour certain·es, étonnantes pour d’autres, à commencer par les Françaises de Montréal. Certaines d’entre elles confient être moins confrontées au harcèlement par rapport à leur vécu en France. On fait le point.
“En France, je me suis faite agressée plusieurs fois : rue, bar, transport… J’ai eu des altercations qui faisaient que je n’osais plus sortir seule de chez moi. Je suis au Canada depuis 2 mois. […] Ici, aucune peur, je sors seule, même la nuit. Il faut rééduquer notre pays, revoir l’éducation, la justice, le comportement.”
Ce témoignage, publié sur Twitter sous le hashtag #moiaussi, ressemble à celui de beaucoup d’autres Françaises qui viennent d’arriver au Québec. Comparée à une autre grande ville de l’hexagone, Montréal semble au premier abord être un paradis délivré de tout problème d’harcèlement de rue.
“Il y en a beaucoup, beaucoup moins. Ce n’est pas une problématique aussi importante qu’en France où il y a même un projet de loi sur le harcèlement”, confirme Mélodie Nelson. Pour la journaliste et auteure, spécialiste des questions de sexualité, cela s’explique car “le sentiment de compétition” est beaucoup plus présent en France où l’on “ne va pas accepter le rejet.”
Malgré ce sentiment prédominant pour les nouvelles arrivantes, le harcèlement reste une problématique au Québec et à Montréal. Un sondage réalisé par le centre d’éducation et d’action des femmes de Montréal montre que sur plus de 200 Montréalaises interrogées, 88 % estiment que le harcèlement de rue est un problème à Montréal et 93 % l’ont déjà vécu.
Le CEAF note par ailleurs que certaines femmes qui ont habité ou voyagé ailleurs déclarent “être confrontées moins souvent au harcèlement de rue à Montréal que dans d’autres villes.” L’une des personnes interrogée confirme : “Victime de ce genre de comportement depuis des années en France, j’étais heureuse de me sentir respectée en tant que femme et libre de mes mouvements autant que dans l’habillement. Malheureusement, depuis quelques années, je constate de plus en plus d’attitudes déplacées envers les femmes qui se promènent dans la rue à Montréal.”
Aujourd’hui, le retentissement des affaires concernant Éric Salvail et Gilbert Rozon a rouvert le débat sur le harcèlement et le consentement au Québec. Les langues se délient à nouveau, ce qui satisfait Justin Trudeau. “Les gens commencent à le comprendre. Les mentalités sont en train de changer. Il y a davantage de soutien pour les gens qui dénoncent. […] Je suis content de voir qu’il y a un début d’éveil”, a commenté le premier ministre canadien en marge d’un déplacement au Lac Saint-Jean.
D’après le ministère de la sécurité publique du Québec, 1 femme sur 3 a été victime d’au moins une agression sexuelle depuis l’âge de 16 ans, près de 90 % des agressions sexuelles ne sont pas déclarées à la police et 82 % des victimes sont des femmes. En France, d’après la Fédération nationale des associations d’usagers de transports, 100 % des utilisatrices des transports en commun ont été harcelées et près de la moitié changent leurs habitudes (vêtements, trajets) à cause du risque de harcèlement de rue.