En mars 2021, Allison Migeon et Brandyn Lewis créent l’Ensemble Obiora, « le premier gros ensemble [au Canada] qui met en avant les musiciens et les compositeurs de la diversité culturelle », précise Allison. Depuis, l’ensemble musical ne cesse de se faire connaître sur les scènes montréalaises les plus prestigieuses dédiées à la musique classique.
Le premier contact d’Allison Migeon avec ce genre musical a lieu il y a quelques années, alors qu’elle est encore étudiante. C’est lors d’un stage aux Chorégies d’Orange, un festival international d’art lyrique et de musique classique, qu’elle assiste à son premier opéra. « Ça m’a laissé une marque, se souvient-elle. C’est comme ça que je suis tombée amoureuse de la musique classique. » Elle poursuit sa carrière dans cette voie, commence à étudier le solfège et le violoncelle, mais constate rapidement qu’elle est l’une des rares personnes issues de la diversité dans ce milieu.
Alors qu’elle est installée à Montréal depuis plusieurs années, la période pandémique et la mort de Georges Floyd la poussent avec son conjoint, Brandyn Lewis, lui-même contrebassiste et directeur artistique, à fonder l’orchestre Ensemble Obiora. Inspirés par Chineke ! Orchestra , premier orchestre en Europe majoritairement composé de personnes issues de la diversité, ils souhaitent notamment rendre la musique classique plus inclusive et plus accessible. « On fait beaucoup d’ateliers avec des enfants pour déconstruire les stéréotypes comme quoi c’est ennuyeux ou ce n’est pas pour tout le monde », ajoute-t-elle.
Au départ, se souvient Allison, le couple imagine un concept assez simple : ils rassemblent des amis musiciens pour organiser un petit concert. « On ne s’attendait pas à l’engouement qu’on allait recevoir et ça a très vite pris une ampleur énorme », se souvient la jeune femme.
En effet, alors qu’ils viennent de créer Ensemble Obiora, le Centre National des Arts d’Ottawa découvre leur concept sur les réseaux sociaux grâce à des dirigeants de l’orchestre. « C’est comme ça que nous avons intégré leur programme de résidence artistique estival et qu’on a pu subventionner notre premier concert. »
De niveau professionnel, l’organisme sélectionne des musiciens de divers horizons grâce à des auditions et l’organisme est désormais aussi bien composé de jeunes musiciens qui sortent de l’école, que de professionnels plus chevronnés. « On essaie de mettre en place une sorte de mentorat, en maintenant toujours la qualité de l’orchestre », précise-t-elle.
L’ensemble a d’ailleurs fait partie de la programmation de la 11e édition de la Virée classique. Les musiciens ont été dirigés par Rafael Payare, le chef d’orchestre de l’OSM. D’origine Afro-Vénézuélienne, il a participé à El Sistema au Venezuela, un programme qui permet aux jeunes issus des quartiers populaires de bénéficier d’une éducation musicale et de faire partie d’un orchestre. « Quand on lui a parlé de l’Ensemble Obiora, dès le début, ça l’a touché, confie Allison. On est vraiment heureux de pouvoir être soutenu par lui et par l’équipe de l’OSM. » Cet évènement a été une occasion pour l’Ensemble d’interpréter des répertoires peu joués dans cette salle mythique, comme les œuvres du compositeur et oudiste Joseph Tawadros.
Et pour ceux qui souhaitent assister à une de leurs prestations prochainement, un quatuor à corde de l’Ensemble Obiora interprètera des pièces écrites par des compositeurs et compositrices afro-descendants dans la cadre des journées de la culture. « Ce concert-médiation a spécialement été crée pour le jeune public », précise Allison Migeon. Deux représentations accessibles gratuitement auront lieu le 28 septembre : à 13h30 au Gerry Robertson Community Center et à 17h30 au Centre Lasallien de St-Michel.
Alors qu’elle cumule un autre emploi en parallèle, Allison espère bientôt pouvoir se consacrer à 100 % à son projet. « On a enfin la possibilité de faire une demande de subvention qui prend en charge les salaires, ça va me permettre de me consacrer à l’ensemble », espère-t-elle. Actuellement en résidence artistique au département de musique de l’Université du Québec à Montréal (UQAM) pour deux ans, l’équipe de l’Ensemble Obiora voit encore plus loin pour le futur. « Notre objectif est de prendre vraiment notre place dans le milieu culturel montréalais et québécois, précise Allison, mais aussi de se créer un chemin plus à l’Ouest, en Alberta et en Colombie-Britannique. »