Il régnait une effervescence hors du commun lors de la présentation à la presse de l’exposition “Thierry Mugler Couturissime” au Musée des beaux-arts de Montréal (MBAM). Aux couturiers montréalais inaugurant l’exposition miroir “Montréal couture” qui leur est consacrée, se joignaient des journalistes venus du monde entier pour découvrir cet évènement en première mondiale, en présence du célèbre couturier. Une expo splendide à ne rater sous aucun prétexte !
Une rétrospective ? Plus que cela. “Ce n’est pas une exposition, c’est un opéra !“, déclarait Nathalie Bondil lors de ce dévoilement. La directrice générale et conservatrice en chef du Musée des beaux-arts peut s’enorgueillir d’avoir réussi à convaincre Mugler là où bien d’autres musées ont échoué.
Ce n’est pas un regard passéiste que le musée a souhaité poser sur le couturier — qui a décidé en 2002 de changer de vie en passant à la photographie, aux costumes de spectacles et à la mise en scène — mais une célébration vivante de son talent, avec une modernité qui lui ressemble. Car novateur, Thierry Mugler n’a cessé de l’être, que ce soit dans le domaine de la couture ou des parfums. “Nous avons créé et ouvert des portes qui n’existaient pas. Et quand une idée est bonne, elle devient logique et évidente“, déclarait Manfred Thierry Mugler aux journalistes.
Ses créations non dénuées d’humour — “C’est le luxe ultime !“, lançait le couturier avec un éclat de rire aux journalistes — sont aussi l’aboutissement de beaucoup de travail et de précision. “Ce qui lie ensemble tout ce qui est montré dans cette exposition, c’est le sens du travail, la passion de ce que l’on fait, la qualité, la recherche du meilleur (…), a -t-il déclaré. La jeune génération doit réaliser que cela passe par la technique, la souffrance, la solitude… tout est lié. On ne peut pas réussir quelque chose de vraiment beau sans la qualité, c’est très important“.
Thierry Mugler évoquait déjà un “parfum à manger” en 1979, bien avant le succès planétaire d'”Angel”, faisait remarquer le commissaire de l’exposition Thierry-Maxime Loriot, rappelant également que le couturier a notamment introduit dans la haute couture les boutons pression (empruntés aux vêtements de travail) et les fermetures éclair dans les vestes. Poussant constamment les limites, le couturier est également connu pour ses shows magistraux et ses mises en scène de superhéroïnes et cyborgs.
L’exposition, qui se décline en six actes, permet de découvrir pas moins de 150 tenues réalisées entre 1977 et 2014, pour la plupart restaurées et exposées pour la première fois. De la haute-couture mais aussi des accessoires, costumes de scène, clips, vidéos, archives et croquis inédits sont présentés dans une mise en scène extrêmement vivante et très réussie incorporant des hologrammes et des effets spéciaux de Rodeo FX, l’entreprise montréalaise connue pour son travail sur la série Game of Thrones. 16 costumes de la tragédie Macbeth sont réunis pour la première fois depuis la présentation de la pièce à Avignon et à la Comédie-Française.
Une centaine de tirages rares de grands artistes et photographes de mode sont également exposés, parmi lesquels Helmut Newton à qui une salle est consacrée. Ce volet photographique est essentiel pour évoquer l’univers de Mugler, ancien danseur puis couturier, qui se dit être “né pour être photographe“.
En miroir à l’univers Mugler, le musée inaugurait également l’exposition “Montréal Couture”, mettant en avant dix couturiers montréalais qui exposent leurs créations précises, modernes, technologiques et/ou irrévérencieuses, parmi lesquels Marie Saint Pierre, Philippe Dubuc, Denis Gagnon, Ying Gao, Fecal Matter et Atelier New Regime.
En réponse à une journaliste lui demandant de parler de Montréal, Manfred Thierry Mugler a eu cette formule parfaite : “fraîche, lumineuse et très chaleureuse à l’intérieur, libre, charmante et très sexy“. Un très beau compliment dans la bouche de celui qui n’a cessé de célébrer les femmes affirmées, “des personnalités qui ont envie d’évoluer, d’exprimer d’autres facettes d’elle-mêmes“. Après Montréal, l’exposition sera montrée à Rotterdam et à Munich. Puis en France ? “Evidemment !“, nous a répondu Nathalie Bondil avec un sourire, mais on n’en saura pas plus.